En octobre 2019, Paul El Kharrat est éliminé des 12 Coups de midi (TF1) après 152 victoires. Le jeune homme de 21 ans atteint du syndrome d'Asperger est reparti avec une cagnotte s'élevant à 691 522 euros et il est devenu le plus grand Maître de midi de l'histoire du jeu, après Christian Quesada. Le Grenoblois, féru d'histoire au point de corriger une erreur de la production, a sorti un livre. Une autobiographie intitulée Ma 153e victoire. Purepeople.com l'a rencontré.
Vous dites dans votre livre que votre autisme est à la fois une force et un handicap. Pouvez-vous nous expliquer ?
C'est une force dans le sens où j'ai une excellente mémoire et une bonne analyse dans ce qui m'entoure. Je sais avoir un recul sur moi-même sur les choses pour être à même d'apporter un jugement dessus. Mais c'est aussi une faiblesse parce que, socialement parlant, ça a toujours été compliqué avec les autres d'instaurer une relation de confiance et d'amitié.
Vous décrivez le milieu de la télévision comme un monde hostile "fait de lumière, de bruit avec des regards braqués" sur vous. Comment avez-vous réussi à surmonter ça ?
J'ai réussi à composer avec, car j'étais psychologiquement apte à assumer tous ces flashs, ces lumières et toutes ces personnes qui m'entouraient et aussi parce que j'étais justement très bien entouré par les animateurs, les casteurs et les techniciens. Toutes ces personnes m'ont donné confiance en moi, donc j'ai pu me détendre un peu plus, rigoler, blaguer et répondre aux questions sans être trop affecté par des difficultés de concentration et d'attention
Votre Asperger a été décelé en 2015, notamment grâce à votre grand-mère. Pourquoi a-t-il été aussi compliqué de poser un diagnostic ?
C'est un parcours du combattant dans le sens où on essaie d'aller voir des psychiatres, des neuropsychologues et toutes sortes de professionnels de la santé psychique sans qu'ils arrivent pour autant, malgré les exercices, à nous orienter vers un diagnostic définitif, posé et qui n'évolue pas . À chaque fois, c'était un diagnostic de psychose et de névrose et j'en passe. Jusqu'à 2015 où une vidéo a tout changé. On a réussi à me reconnaître, à reconnaître ce qui pourrait caractériser un syndrome autistique, en l'occurrence l'autisme Asperger. C'était une vidéo envoyée par ma grand-mère qui nous a permis d'être mieux orientés par la suite.
Votre père a eu, semble-t-il, plus de mal à accepter ce diagnostic...
C'était un peu plus compliqué parce qu'il avait l'image de l'autisme qui était une image assez difficile, voire insoutenable, c'est-à-dire l'image d'un enfant mutique avec tous les clichés de l'autisme qui vont avec. Il fallait rassurer mon père et d'autres qui pensaient de la sorte, car on s'exprime bien, on n'est pas atteint mentalement par une grave pathologie. Il faut se faire à cette société-là, même si c'est compliqué. Il n'y aura pas d'affection cognitive, ce n'est pas une maladie, mais un handicap.
Vous dites : "J'ai l'impression que, dans cette société, les choses qui me semblent les plus folles sont considérées comme les plus normales." Avez-vous des exemples ?
Ne pas faire ce qu'on aurait envie de faire et de parfois être obligé de faire ce pour quoi on n'a pas du tout envie d'être assujetti. Par exemple, le fait de devoir se lever tôt pour aller au travail alors qu'on a besoin de sommeil. Moi je dis qu'il faut continuer de dormir jusqu'à qu'on en ait plus besoin. Il y a aussi le fait de devoir supporter en terrasse la fumée de quelqu'un alors que c'est très toxique, le fait d'être dans la destruction permanente, que ce soit environnementalement ou autre. Je pense aussi aux normes instaurées comme bien tenir, ne pas dire ou faire ça. Il y a des choses que je ne comprends pas comme ne pas rigoler sur certaines choses, ne pas dire ça à une personne alors que c'est la vérité. Selon la société, il est normal de mentir parfois, alors que non, il faudrait tout le temps dire la vérité.
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