Des scènes du documentaire Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste ont été coupées au montage. Celle où Marie Portolano, à l'origine du film dénonçant le sexisme dans le milieu du journalisme sportif, confronte Pierre Ménès sur le jour où, en 2016 sur le plateau du Canal Football Club, il soulève sa jupe et lui empoigne les fesses hors antenne mais face à un public bien présent a sauté. Tout comme celles où Isabelle Moreau revoit la séquence d'un baiser volé par Pierre Ménès en 2011, puis que Marie Portolano demande des explications au journaliste. Des scènes disparues comme par enchantement du documentaire diffusé sur Canal+ dimanche 21 mars 2021. Sur le plateau de Touche pas à mon poste, les images concernant Marie Portolano et Pierre Ménès ont été diffusées, mais rien sur Isabelle Moreau... Mercredi 24 mars 2021, nos confrères des Jours, qui avaient dénoncé le montage arrangé de la chaîne, partagent les scènes problématiques.
"Cette scène, je la trouve moche, lance Isabelle Moreau, émue aux larmes face à Marie Portolano. Sur le moment, je ne l'ai pas vécu comme je le vis là, mais après tous les témoignages qu'on entend... Mais attention, je n'ai pas été victime de harcèlement." Et de rappeler que pour elle, dix ans plus tard, "cette image est dévastatrice". "Je m'en suis aperçue trop tard mais ça a été le déclencheur de tout mon processus pour me dire 'c'est fini', poursuit-elle. Parce que, quelle crédibilité accorder à une femme qu'on peut embrasser comme ça, selon son bon vouloir ? Alors j'ai joué le jeu et c'est ça qui est terrible. Je joue le jeu parce que je ne veux pas casser l'ambiance de l'émission, sauf que le résultat, il est cruel." Plus encore, Isabelle Moreau estime que "c'est mettre à terre des années de boulot".
Contrairement au levé de jupe de Marie Portolano en 2016, Pierre Ménès se souvient de son baiser volé à Isabelle Moreau en 2011. "Je ne suis pas gâteux !", lance-t-il. "J'ai le souvenir que je vais pour l'embrasser et qu'elle ne se détourne pas du tout, elle met sa main autour de moi. Elle a totalement assumé ça", assure l'acolyte d'Hervé Mathoux avant de prendre connaissance de la réaction d'Isabelle Moreau. Une réaction qu'il trouve "choquante".
"Aujourd'hui, ça ne se passerait plus. C'est la société qui lui dicte ce qu'elle dit là. Très franchement, quand je vais pour l'embrasser je ne pense jamais l'embrasser sur la bouche, mais elle ne s'est pas détournée", lâche-t-il. Et de s'emporter : "Ce n'est pas un smack qui va te salir non plus, il faut se calmer ! Tout ça, c'est ce que je ne supporte plus dans le truc d'aujourd'hui. Si tu ne peux plus faire un bisou sur la bouche à une copine... Au secours ! Au secours : 'image dévastatrice' mais là aussi, il faut avoir conscience de ce que l'on dit." Pierre Ménès, "choqué", ne regrette pas son geste et trouve même la prise de conscience d'Isabelle Moreau "malhonnête". "Non. Parce que je l'ai pas vraiment fait. Je me souviens d'être surpris, je me souviens de son bras autour de moi, en fait je suis surpris et je me dis 'c'est chouette, elle joue le jeu'", conclut-il.
Contacté par nos confrères des Jours, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a rappelé que "la position du gouvernement est de lutter fermement contre les violences sexistes et sexuelles". De son côté, la ministre des Sports Roxana Maracineanu s'est également exprimée sur la question. "Aujourd'hui, ce cas-là précisément concerne l'employeur de Pierre Ménès, comme cela concerne les employeurs de mettre à l'antenne, de favoriser, d'accréditer et de légitimer la présence de personnes qui pensent cela", indique-t-elle, renvoyant à Canal+ le sort du journaliste...