Après avoir mis des femmes au centre de son travail, François Ozon a souhaité faire un film sur l'expression des émotions par des hommes, apprend-on de sa bouche dans Les Inrocks. Lui qui était donc plutôt habitué à caster des femmes pour les premiers rôles devait donc trouver trois acteurs pour incarner trois victimes du père Preynat. Devant sa caméra brillent Denis Ménochet, Swann Arlaud et Melvil Poupaud. Dans le magazine Têtu, on l'interroge sur le fait que, contrairement à son habitude – la distributions de 8 femmes, pour ne citer qu'elle, était composée de stars –, Grâce à Dieu fait la part belle à des acteurs moins célèbres.
"Au début, j'ai rencontré des comédiens très connus, très 'bankable'. J'ai essuyé plusieurs refus. Je ne donnerai pas de nom, mais un acteur très célèbre m'a répondu 'Je ne suis pas sûr que faire votre film soit très bon pour mon image auprès de mon public de droite'. (rires.) Mais je considère qu'un acteur qui dit 'non' a toujours raison. S'il ne sent pas le rôle, il vaut mieux qu'il ne le fasse pas. Avec le recul, je pense que ça aurait desservi le film si j'avais choisi une star pour jouer Barbarin ou Preynat", explique François Ozon dans Têtu.
Stars ou pas, Grâce à dieu, qui vient de décrocher l'Ours d'argent à Berlin, est puissant. Les comédiens habitent chacun à leur façon leur personnage et rendent justice à trois victimes bien réelles qui ont fondé l'association La Parole libérée. Dans Le Parisien Magazine, Alexandre Dussot-Hezez, victime d'abus sexuels enfant, déclarait : "[François Ozon] voulait réaliser un documentaire sur notre histoire. Nous ne voulions pas un reportage de plus, alors il s'est lancé dans une fiction. Je suis persuadé que cela aura plus d'impact qu'un documentaire. Les faits divers tombent dans l'oubli. L'art reste. Je crois au pouvoir de la fiction pour faire bouger la société."
De son côté, la justice a tranché : la sortie du long métrage n'est plus compromise par deux procédures judiciaires. L'ex-membre du diocèse de Lyon Régine Maire, qui avait assigné François Ozon en référé (procédure d'urgence), a été déboutée de sa demande. Elle réclamait que le réalisateur supprime son nom du film au nom du respect de sa vie privée et de la présomption d'innocence, indique l'AFP. Cette femme, aujourd'hui âgée de 80 ans, a comparu début janvier à Lyon aux côtés du cardinal Philippe Barbarin pour ne pas avoir dénoncé à la justice les agressions de Bernard Preynat. Le jugement dans ce dossier doit être rendu dans quelques jours, le 7 mars. C'est une seconde victoire pour l'équipe du film, qui avait aussi été directement assignée par. L'ancien prêtre demandait un report de sa sortie au nom de la présomption d'innocence car il n'a pas encore été jugé. Mais sa demande a aussi été rejetée lundi à Paris.
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans le magazine Têtu du printemps 2019