François Ozon, réalisateur de renom, a réagi pour la première fois aux accusations qui frappent l'abbé Pierre, décédé en 2007. Pour rappel, 24 femmes accusent l'icône de la charité en France d'agressions sexuelles. Des témoignages qui ont révélé un autre visage d'un personnage autrefois admiré pour ses actions. François Ozon, interrogé par nos confrères de la Tribune du Dimanche, n'a pas hésité à donner son avis.
Réalisateur de Grâce à Dieu, qui traitait des abus sexuels au sein de l'Église, François Ozon n'a pas caché son indignation, bien que la nouvelle ne l'ait pas étonné. "Voilà un vieux grand-père indigne... Heureusement que le pape ne l'a pas sanctifié. Je connais bien le monde de l'Église donc je n'ai pas été surpris par ces révélations, mais je l'ai plutôt été par le silence de tous ces gens 'qui savaient' au sein de l'Église : même le pape était au courant", a-t-il entamé.
"En fait, cette histoire me conforte dans l'idée de la complexité de l'être humain : dans sa vie, l'abbé Pierre a aussi créé des choses extrêmement positives...", a-t-il analysé. "C'est cette balance entre les deux qui est très perturbante, à laquelle s'ajoute l'hypocrisie de l'Église et de ses gens de pouvoir, qui affichent un message de paix et d'amour, mais qui ne suivent pas les préceptes qu'ils inculquent aux autres."
François Ozon et l'ère MeToo qui s'impose dans le cinéma
Gérard Depardieu, Benoît Jacquot, Jacques Doillon... Ils ont été nombreux à tomber avec le mouvement MeToo qui s'est emparé du cinéma français. Une bonne nouvelle pour les femmes du milieu qui se battent pour avoir des conditions de travail saines et sécurisées. Dans les colonnes de nos confrères, François Ozon a également réagi à ce phénomène. "Je n'ai jamais eu de problème, car j'ai toujours travaillé dans la confiance. Mais je trouve bien de mettre des 'garde-fous' comme les coordinateurs d'intimité : ça permet de dédramatiser et ça s'intègre vraiment dans le travail."
Le réalisateur de 56 ans est très conscient que le cinéma, "très hiérarchisé", peut facilement devenir un terrain propice aux abus. "Il s'agit d'en avoir conscience et de travailler dans le respect et le consentement", a-t-il déclaré. "Beaucoup d'injonctions pèsent sur les femmes, mais je trouve qu'elles ne s'en sortent pas si mal, vu les siècles de domination masculine... Même si c'est loin d'être fini : on le voit avec l'affaire Pelicot, qui est délirante et qui, à mon avis, est un tournant pour beaucoup d'hommes, qui prennent conscience de ce que peut engendrer le patriarcat." François Ozon ne doute pas que, si le combat reste long, la condition féminine ne cessera de s'améliorer. On l'espère !