Quelques jours après les César et la prise de position très claire de plusieurs femmes lors de la cérémonie – à l'instar d'Adèle Haenel, Céline Sciamma ou Florence Foresti – à l'annonce de la récompense de Roman Polanski, l'actrice Sara Forestier ajoute une pierre à l'édifice de la libération de la parole.
Invitée le 9 mars 2020 dans l'émission C à vous pour défendre son dernier film, Filles de joie, qui aborde la question de la prostitution en Belgique, mais aussi de l'emprise psychologique des hommes sur les femmes, Sara Forestier a révélé avoir été victime de violences conjugales. "Il se trouve qu'au moment où j'ai lu ce scénario, j'étais avec un garçon qui m'a frappée et le personnage vit les mêmes choses, a commencé l'actrice de Roubaix, une lumière.
"Il y avait des choses comme ça dont j'avais envie de témoigner qui sont ces choses qui ne sont pas forcément dicibles. C'est-à-dire qu'en fait, l'emprise, le sujet de l'emprise, c'est un sujet extrêmement complexe." L'actrice revient alors sur son expérience personnelle. "Ce qui s'est passé dans ma vie et que je trouve très juste sur l'emprise, c'est que quand on se construit dans la vie, on met une certaine limite de notre dignité. Et quand on a une intrusion de violence, c'est une réelle intrusion et ça met une forme de chaos dans son rapport à soi-même, le rapport à sa dignité, le rapport à l'autre et où on place les limites. Et ça met du temps pour se reconstruire, je trouve, en tout cas, c'est mon expérience. Et c'est pour ça qu'il y a des gens qui ne comprennent pas pourquoi les filles ne parlent pas tout de suite. Ça met du temps de remettre les limites au bon endroit."
Au lendemain des César, Sara Forestier avait fait une longue déclaration sur Instagram. "J'aurais dû quitter la salle. On aurait dû quitter la salle. Je n'ai pas réussi à dormir de la nuit. C'est après coup, seule dans ma chambre, que j'ai pris la mesure de la terreur de la situation", a écrit la comédienne ce samedi 29 février sur son compte Instagram. " Que le film de Polanski soit éligible c'est une chose (...), mais le consacrer en est une autre. C'est notre responsabilité, à nous, gens du cinéma. Et, profondément, je me sens mal. Nous ne pouvons pas faire comme s'il était un citoyen lambda, dans la mesure où il est fugitif. Je pense aux femmes, et clairement là, ce soir, en faisant le choix de le récompenser, certains ont fait le choix d'étouffer une réalité pour faire comme si la situation était normale. Non, être fugitif n'est pas normal, ni acceptable. Réveillons-nous !" La publication a depuis été supprimée.