Figure iconoclaste du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, la ministre déléguée à la Francophonie Yamina Benguigui continue à dire les choses comme elle les pensent. Invitée à débattre par Paul Wermus dans VSD avec l'historien Gonzague Saint-Bris et Adel Fekih, nouvel ambassadeur de Tunisie en France, la ministre revient sur sa position au sein du gouvernement et son lot d'embûches. Touchée par les critiques récentes dont elle a été la cible, elle fait le point.
Yamina Benguigui dénonce le sort réservé aux femmes qui osent faire de la politique surtout à un poste de ministre. "Il existe un sexisme rampant, je suis entrée au gouvernement dans la case Rachida [Dati], mais je m'appelle Yamina, je fais du 40, je n'entre pas dans le 35 !", clame-t-elle. Ce sexisme, elle l'a surtout ressenti en octobre lors d'un déplacement dans le cadre de ses fonctions. Accusée à tort d'avoir utilisé un jet privé, la ministre met les choses au clair. "Je suis victime du délit de sale gueule. Je me suis rendue dans une région en guerre dans le Nord de la République démocratique du Congo. Pour y aller, j'ai pris un avion militaire et ça s'est transformé dans la presse en jet privé, tout ça parce que je suis une femme", affirme-t-elle. Refusant de prêter le flanc aux critiques Yamina Benguigui reste droite dans ses bottes. "Originaire de Kabylie, je sais ce qu'est un dos d'âne ! (...) Ces critiques ne me tuent pas, elles me blessent, car elles sont injustes."
Avant sa nomination, Yamina Benguigui était avant tout réalisatrice (on lui doit notamment la série Aïcha sur France 2 avec Sofia Essaidi, mais aussi de nombreux films à connotation politique sur la cause et la défense des femmes immigrées) et déjà adjointe au maire de Paris Bertrand Delanoë, en charge des Droits de l'homme et de la lutte contre les discriminations. Ce poste de ministre prouve la confiance que lui accorde le Premier ministre et le président François Hollande. Sa nomination, Yamina Benguigui confie l'avoir apprise avec surprise. "J'étais au bistrot, coup de téléphone de Hollande, qui me dit : 'Veux-tu entrer au gouvernement ?' J'ai demandé à réfléchir, j'étais en pleins préparatifs de mon film Les Trois Soeurs, avec Isabelle Adjani", raconte-t-elle. Elle hésite avant de se rendre à l'évidence : "Tous mes films sont politiques, je suis une politique." Elle ajoute : "Mon parcours de cinéaste me sert dans ma nouvelle mission."
Thomas Montet
L'intégralité de l'interview de Yamina Benguigui est a découvrir dans "VSD", en kiosques depuis le 15 novembre 2012.