Poète moderne de l'humain s'il en est, Alain Souchon n'avait encore jamais pris part à la Fête de l'Huma. Le rassemblement populaire organisé par le PCF, qui célèbre cette année une 80e édition endeuillée par la disparition de Jean Ferrat, l'avait convié à investir, au sortir d'une belle tournée estivale, à investir la Grande Scène et à partager ses points de vue chantés, mordants sur le fond et doux-amers dans la forme, avec une partie des 600 000 personnes attendues au cours des trois journées (10-12 septembre) du rendez-vous de La Courneuve.
En amont, celui qui déplore depuis belle lurette la "dérision de nous, dérisoires" et stigmatise la course à "l'avoir plein nos armoires" s'est confié dans les colonnes du journal. Extraits.
Regardant a posteriori son parcours, il se félicite d'être un... privilégié, au bout du compte, et se montre admiratif du tempérament de son alter ego Laurent Voulzy : "Je n'en reviens toujours pas. Moi qui partais en me disant : " Qu'est-ce que je viens faire-là ? " j'ai été choyé par l'existence. J'ai rencontré une femme adorable, j'ai des enfants adorables. J'ai gagné suffisamment d'argent, ce qui m'a permis d'avoir une belle maison où mes enfants amenaient leurs copains. J'ai eu vraiment énormément de chance. J'ai beaucoup aimé travailler la langue française, comme ça, travailler avec Laurent qui est un truc de fraternité où on est là pour l'autre à 100 %. Sa façon de voir le monde... J'aime bien, comme il est tellement différent de moi. Laurent, il est solaire, il est plein d'espoir, il aime le monde, les gens. Il est charitable, gentil... C'est agréable, enrichissant."
La Fête de l'Huma, entre fête (avec, cette année, The Prodigy, Dutronc, Madness, Caravan Palace, Clarika...) et militantisme : "c'est surtout une fête. On y va chanter, sans se poser de questions. C'est romantique, le communisme. On y est attaché. Ça fait partie de la France, de ma jeunesse, du Tour de France, des casquettes Ricard, des ouvriers qui vont au bord de la mer, qui déplient des tables sur le bord de la route, en 4 CV. C'est ça, pour moi, le communisme. Ce sont des gens simples qui espèrent un monde meilleur. Le monde ouvrier, c'est touchant. Tout le monde y est attaché. La Fête de l'Huma, c'est ça."
La décadence de l'idéal contemporain : "Aujourd'hui, il y a une espèce de dépendance à l'argent qui est un peu moche, triste. Quand vous parlez avec des gens, le gars qui est intéressant c'est celui qui a du fric. Ce n'est pas : " Je voudrais être Jean-Paul Sartre, avoir le prix Nobel de littérature ou traverser l'Atlantique à la rame. " C'est " Je voudrais avoir du fric ! " Ce n'était pas comme ça avant. Qu'il n'y ait plus que le matériel qui compte, c'est tristounet (...) ce que je retire de tout cela, c'est que " trop d'argent " c'est mauvais pour la santé mentale. L'argent, c'est super, mais trop, je pense que ça tue. L'argent, c'est vachement intéressant, en fait. C'est une espèce de thermomètre de la vie d'un homme. Ça rend idiot, on se prend pour ce qu'on n'est pas, ça rend supérieur, ça démolit la tête, je crois. Et ne pas avoir assez d'argent, ça gâche tout aussi."
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