L'avenir d'Audrey Pulvar à la télévision et à la radio est plus qu'incertain.... Après avoir dû abandonner sa quotidienne de France Inter et moins de deux semaines après l'annonce de l'arrêt de sa participation au talk-show phare de France 2, On n'est pas couché, nos confrères de PureMedias ont révélé que la journaliste n'avait pas été choisie pour tenir les rênes du nouveau magazine culturel de la chaîne. Aujourd'hui, la journaliste, compagne d'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, se lâche dans les colonnes de Libération et n'est pas tendre avec son employeur, France Télévisions.
"Je ne sais pas être femme de quelqu'un"
"Avant d'être femme, femme noire, antillaise et 'femme de', je suis profondément journaliste", explique Audrey Pulvar en début d'interview avant de revenir sur son éviction d'On n'est pas couché où elle jouait les éditorialistes. On apprend qu'en juin dernier, lorsqu'elle a vu le patron du groupe, Rémy Pflimlin, celui-ci lui a expliqué que "la situation était intenable".
Elle poursuit : "Tout le monde me dit que ce n'est pas moi, le problème. Le problème, c'est qu'on soupçonne qu'Arnaud Montebourg pourrait me manipuler." Mais si la journaliste ne remet pas en cause le fait que le soupçon soit bel et bien là, elle ne peut accepter ce procès d'intention, ajoutant que "tous les journalistes peuvent être soupçonnés de connivence". Elle poursuit : "Quand je regarde certaines interviews politiques télévisées, je n'ai pas le sentiment que le job soit fait ; que l'invité soit de gauche ou de droite..."
Pour la pousser dans ses retranchements, Libération lui rappelle la prise de position de son compagnon Arnaud Montebourg à propos du conflit d'intérêts entre Béatrice Schönberg et Jean-Louis Borloo, mais elle répond : "Moi, je n'ai pas dit ça. Moi, j'ai toujours pris la défense de mes consoeurs. (...) A mon avis, Arnaud Montebourg a perdu une bonne occasion de se taire !"
"Non seulement, je suis cataloguée 'femme de' mais en plus on me prend pour une conne"
Si Audrey Pulvar n'a jamais douté de la difficulté de sa situation, elle ne s'attendait pas à ce que la direction de France Télévisions lui dise "que ce n'était pas possible". Elle revient sur sa fameuse réunion du 1er juin avec Rémy Pflimlin : "Il m'a dit que le projet (un débat de société proposé par Bertrand Mosca, NDLR) était enterré, pas assez divertissant. Et qu'il avait déjà quelqu'un pour le magazine culturel. Je lui ai dit : 'Ok, est-ce qu'on peut réfléchir à quelque chose d'autre ?' Il m'a répondu : 'Enfin, Audrey, on est le 1er juin, les grilles de septembre sont bouclées.' Et Audrey Pulvar de s'insurger : "J'ai rarement vu les chaînes de télé boucler leurs grilles de septembre le 1er juin, surtout si elles ont envie de travailler avec quelqu'un."
"Non seulement je suis cataloguée 'femme de', mais en plus on me prend pour une conne : c'est doublement désagréable. Ça remet l'ego en place... Rémy Pflimlin m'a dit : 'Peut-être en janvier.' Oui, c'est ça, prends-moi pour un jambon", s'agace Audrey Pulvar dans l'entretien.
"J'aimerais qu'on se mette de temps en temps à la place de Valérie Trierweiler"
Bien évidemment, la journaliste est enfin interrogée sur le fameux tweet de Valérie Trierweiler, qui a enflammé la médiasphère - la première dame a confirmé son soutien à l'opposant de Ségolène Royal à La Rochelle pour les législatives, une prise de position désapprouvée par 69% des Français. Pour Audrey Pulvar, la question n'est pas de savoir s'il s'agit ou non d'un faux pas. "Ce qui me frappe, ce n'est pas le tweet de Valérie Trierweiler, mais le fait que François Hollande, qui a pourtant promis qu'il ne se mêlerait pas des affaires du Parti socialiste, écrive noir sur blanc qu'il soutient Ségolène Royal", s'insurge la journaliste.
Audrey Pulvar appelle aussi à la clémence : "Laissons-lui le droit à quelques errements. Le Fouquet's ne faisait pas un programme politique, le tweet de Valérie Trierweiler non plus." La journaliste s'interroge enfin sur le rôle de première dame, dépourvu de statut : "Soit on considère qu'elle est encore journaliste et on la traite comme une consoeur et non comme une espionne. Soit on se dit que ce n'est plus possible et on lui demande de faire autre chose de sa vie."
Quid de l'avenir ?
Audrey Pulvar a des propositions à France Inter, qu'elle avait quittée sans ronchonner, concédant ne plus pouvoir assurer un espace d'information qui se voulait neutre. La radio publique lui propose le 22h-minuit le samedi soir. "Je suis contente du concept proposé mais j'ai des doutes sur l'horaire et le jour, on réfléchit à une autre place sur la grille", explique-t-elle. Si elle ne sait pas encore où elle sera à la rentrée - elle n'exclut pas de devoir aller à Pôle Emploi ! -, la journaliste se sait "dans une situation privilégiée". "Par décence, par pudeur, je n'ai pas envie de me victimiser", explique-t-elle.
Audrey Pulvar revient, en fin d'interview, sur le statut de plus en plus complexe des femmes de pouvoir. Comment gérer les conflits d'intérêts que peut créer l'exercice par un conjoint d'un poste à responsabilités ? La journaliste lance le débat et pose une question ouverte sur ce vaste sujet qui n'a pas fini de diviser et de faire parler. "Il faudra que ce débat-là dépasse le simple cas de Valérie Trierweiler ou d'Audrey Pulvar", conclut-elle.
Valentine Maingault
Interview à retrouver dans le "Libération" daté du vendredi 15 juin 2012.