En janvier 2010, Kristina Rady, la mère des deux enfants de Bertrand Cantat, se suicide. L'organisatrice de concerts avait 41 ans seulement. Dans une enquête publiée ce jeudi 30 novembre dans Le Point, de nouvelles preuves sont apportées concernant l'emprise de l'artiste sur Kristina dont un mail, bouleversant, dans lequel elle exprime toute sa détresse et sa peur. Tout aussi secouant, le témoignage d'un ex-membre de Noir Désir qui raconte de quelle manière Kristina et le groupe ont protégé Bertrand Cantat à Vilnius au mépris de la justice.
En 2003 à Vilnius, où Marie Trintignant vient de mourir sous les coups du chanteur, Kristina Rady et les membres de Noir Désir arrivent pour soutenir Bertrand Cantat. Kristina déclare qu'il n'a jamais levé la main sur elle.
Sept ans plus tard, plusieurs mois après la pendaison de la jeune femme, Noir Désir explose dans un communiqué cinglant de Serge Teyssot-Gay : "Je fais part de ma décision de ne pas reprendre avec Noir Désir, pour désaccords émotionnels, humains et musicaux avec Bertrand Cantat, rajoutés au sentiment d'indécence qui caractérise la situation du groupe depuis plusieurs années."
L'enquête a bien été rouverte sur la mort de Kristina Rady mais n'a pas débouché. Son père affirme même dans Le Point avoir "renoncé" à connaître un jour la vérité. Un des anciens membres de Noir Désir raconte, sous couvert d'anonymat, que Cantat a été protégé à Vilnius : "Kristina m'a vu et elle m'a demandé, à moi et à tous les autres membres du groupe, de cacher ce que l'on savait. Elle ne voulait pas que ces enfants sachent que leur père était un homme violent." Le désir de protéger Milo et Alice, âgés aujourd'hui de 20 et 15 ans, est compréhensible. Mais le récit de l'ancien compagnon de route ne s'arrête pas là et fait froid dans le dos : "Je savais qu'il avait frappé la femme avec qu'il était avant Kristina. Je savais qu'il avait tenté d'étrangler sa petite amie, en 1989. Mais, ce jour-là, nous avons tous décidé de mentir. Nous étions tous sous son emprise. Et nous pensions qu'il se soignerait."
La suite, c'est une condamnation à huit ans de prison. Bertrand Cantat obtient du tribunal lituanien d'effectuer sa peine dans la région de Bordeaux, près de ses enfants. Il en effectue la moitié et retrouve Kristina à sa sortie de prison. À en croire le dernier compagnon de la défunte, François Saubadu, mais aussi un mail et un message vocal de la principale intéressée, Kristina a vécu un enfer auprès du chanteur avant de mettre fin à ses jours.
Le Point a contacté son avocat. Me Antonin Lévy (fils de BHL) n'a pu joindre Bertrand Cantat mais estime qu'il n'est pas persuadé qu'il "puisse répondre à des témoins dont il ne connaît pas l'identité et qui recouvreraient subitement la mémoire des années après les faits." Pour étayer sa thèse, celle de l'omerta qui règnerait autour de la personnalité violente et manipulatrice et Cantat, Le Point a également interrogé un journaliste de la région de Bordeaux qui estime que "tout le monde savait que Kristina avait été battue avant l'affaire Vilnius", mais aussi une voisine qui aurait abrité les enfants du couple quand Kristina Rady fuyait leur père.
Le Point, en kiosques le 30 novembre 2017.