C'est (presque) officiel : Chris Martin veut pousser Bono à la retraite et prendre la relève - il va falloir plancher fort sur l'aspect philanthrope et socialite, cela étant.
Trois ans après la consécration de l'album Viva la vida or death and all his friends, deux ans déjà après avoir annoncé qu'un cinquième album était en chantier avec une poignée de chansons précocément mises en forme, Coldplay révélait ce vendredi son nouveau single officiel : Every teardrop is a waterfall ("chaque larme est une cascade").
Les Londoniens n'ont pas menti sur leur désir d'emmener leur musique sur d'autres routes, mais qu'ont-ils donc bien pu faire de leur volonté, répétée à l'envi ces deux dernières années, de se concentrer sur la dimension acoustique, d'explorer leurs instruments, d'expérimenter ?
Car en fait de larmes, c'est une cascade d'effets pop qui rendent la marque Coldplay de plus en plus mainstream, déferlant et manquant d'engloutir Every teardrop is a waterfall. Pourtant, en décembre 2010, l'inédit Christmas Lights (un morceau dont personne n'a voulu vraiment dire s'il fallait l'écouter comme un one shot ou comme un titre lié au futur album), tantôt à la limite de la rengaine country-pop, tantôt quasi usurpateur de la piano-ballad attitude de The Fray, montrait plus de modération dans la production...
Chronologiquement, des synthés taillés pour les stades nous agressent d'entrée en nous promettant un nouvel hymne coldplayesque ; puis la voix de Chris Martin entre en scène, surnageant tout juste dans ces premiers flots de synthpop et de réverb', où vient naviguer une guitare acoustique. Et boum, voici venir le beat de marche triomphale et quasi-cosmique, bien reconnaissable puisqu'il est identique à celui, si efficace, de Viva la Vida. Une question : c'est bien Brian Eno (producteur historique de... U2, notamment) à la (co)production (l'âme de Roxy Music était déjà aux manettes du précédent Coldplay), ou a-t-il été échangé contre Stuart Price ?
Qu'on s'entende : ça s'écoute, et, de manière plutôt cohérente, on retrouve mêlées dans ce Everytear is a waterfall (qui inclut des emprunts à un tube de Peter Allen, I Go to Rio ; oui, vous avez bien compris : ce même tube que nous connaissons comme le Je vais à Rio de Claude François !) différentes facettes de Coldplay, entre la densité hymnique de Viva la vida or death and all his friends et le zest de trucage électro de X & Y, ainsi que des éléments permanents qui font toujours mouche (ligne mélodique soignée et catchy, paroles volontiers évasives mais stimulant l'imaginaire et véhiculant de grandes émotions, superbes passages presque obligés en voix de tête). Mais Coldplay était jusqu'à maintenant synonyme de claque audio-sensorielle : cette fois pourtant, et même si on n'imaginait pas pouvoir être déçu, ce n'est pas le cas. On a affaire à un son tout public et radio-friendly qu'on peut autant rattacher à U2 qu'à Taio Cruz !!!
Et déjà, les avis sont partagés : la majorité, inconditionnels de la bande et déjà conditionnés par la tentation électro de X & Y, approuvent sans retenue et s'ébattent dans les remous pop du single ; les autres, qui ont failli espérer que Coldplay renouerait (un peu) avec sa griffe originelle, en sont quittes pour attendre la suite (l'album est prévu pour l'automne) avant de faire leur deuil.
Attention, les gars, le fossé avec le James Blunt nouveau (le James Blunt positif qui chante Stay the night) se réduit dramatiquement...G.J.