Il faisait rire, mais désormais il surprend. L'acteur Franck de Lapersonne, dont le visage a écumé de nombreuses comédies, a décidé de rejoindre tambour battant les rangs du Front National de Marine Le Pen. Une démarche inattendue pour un artiste qui a été longtemps de gauche et qui s'amuse des clichés dans des films tels que Case départ et Le Crocodile de Botswanga avec Thomas Ngijol et Fabrice Eboué. Libération a tiré son portrait afin d'en savoir plus sur les motivations du comédien.
"L'homme est charmant. Trop peut-être", écrit le journaliste de Libération. Sa bonhomie est restée intacte mais son discours laisse songeur. "Je fais partie des Français qui se sont fait avoir. Sinon, j'aurais pas pris cette option", dit Franck de Lapersonne. Il parle de "bataille contre l'anglosphère" en assurant que les boîtes de doublage sont délocalisées au Maroc et que les les acteurs passant des castings pour des films français doivent aussi les faire en anglais. Il a préparé un programme culturel pour le Front – qui en a déjà un précise le quotidien : "Ça n'engage pas Marine, hein", clame celui qui a été promu "délégué général aux questions culturelles" et a été investi pour les législatives dans la Somme, face à François Ruffin, réalisateur du documentaire césarisé Merci Patron. Cependant, il n'est pas encarté car il tient à sa position d'artiste, et n'a plus de revenus : "Là, je vis un peu dans le vide, sur des fifrelins que j'ai conservés."
Que pense son entourage du choix politique de Franck de Lapersonne, célibataire et sans enfant ? Son agent a claqué la porte. Le metteur en scène Jean-Michel Ribes, qui l'a fait tourner, dira : "Il a toujours été doué, mais avoir du talent ne fait pas de vous quelqu'un de recommandable." Stéphane Guillon a écrit lui une lettre ouverte à son "ami", suite à son ralliement à Marine Le Pen. Les deux hommes se connaissent depuis 1981. Elle commence par des éloges : "Franck était un comédien extrêmement doué, doté d'une force comique incroyable, un mélange de Jacques Charon et de Louis Seigner." Il l'attaque sur ses choix de carrière : "Étonnamment, Franck se complut très vite dans des choix faciles : présentateur d'une émission pour enfants, Vitamine, puis d'une autre pour grands enfants, Sexy Zap, une série érotico-comique, à base de plagiats..." Il explique le virage politique de son collègue ainsi : "Franck est enfin une tête d'affiche, mais pas celle que tout le monde espérait. Tête de gondole au Front National ! Dimanche, Franck a de nouveau entendu les applaudissements d'une salle pleine." Ce à quoi Franck de Lapersonne répondra : "Guillon défend son bout de gras en montrant qu'il est du bon côté."
Les Inrockuptibles ont également mené leur enquête : "Le coming-out frontiste de Franck de Lapersonne a logiquement choqué une partie du cinéma français, qui s'est brusquement désolidarisé de lui. Contactés pour ce portrait, de nombreux acteurs ont refusé de s'exprimer sur celui qu'ils ont désormais rebaptisé 'Mister Nobody'." Pour Jean-Michel Ribes qui s'est aussi confié aux Inrocks, les personnages souvent conservateurs qu'il a incarnés sur grand écran auraient déteint sur lui.
Franck de Lapersonne ne fait plus rire le milieu du cinéma français. Il laisse songeur aussi, en témoigne son intervention au meeting de la candidate à la présidentielle à Nantes le 15 avril, relayé par le compte Twitter bien nommé MalaiseTV :