A moins d'un mois des Oscars, Jean Dujardin s'apprête à effectuer son retour à Hollywood pour remettre le prix du meilleur acteur, probablement au grand favori Daniel Day-Lewis (Lincoln). Un retour des choses qui permettra à l'acteur français de 40 ans de définitivement tourner la page. En un an, le comédien a pris une envergure inespérée, surfant sur le succès de The Artist ponctué par un Oscar du meilleur acteur. L'occasion de mettre les choses au clair, lors de confidences accordées sans détour au magazine Première pour lequel l'élégant Dujardin pose en couverture.
"Aux États-Unis, je ne suis rien"
Refusant d'admettre qu'il a mis Hollywood à ses genoux, devenant en parallèle une sorte d'icône historique pour la France, Jean Dujardin la joue modeste. Peut-être même trop, lui qui s'évertue à parodier le gros melon dans de nombreux personnages, de Brice (de Nice) à OSS 117 en passant par les sketches de ses débuts. "Je suis un acteur tchèque, moi, aux États-Unis", corrige celui qui semble ne pas vouloir embrasser une carrière hollywoodienne après deux apparitions aux castings des prochains Scorsese (The Wolf of Wall Street) et Clooney (The Monuments Men, qu'il va bientôt tourner).
La barrière de la langue, mais surtout un vrai mal du pays. Jean Dujardin dénonce en effet les "proportions démesurés" qu'ont pris sa statuette, affirmant qu'il n'a "pas le sentiment que ça ait changé grand-chose" et que ses brefs tournages américains relèvebt de "l'exotique". "J'ai surtout envie de bosser en France", martèle Dujardin, pur produit de la petite lucarne, starisé avec Un gars, une fille.
Loin du brouhaha créé par les Oscars et le succès international de The Artist, Jean Dujardin fantasme sur "un petit film sous la direction d'un metteur en scène avec qui [il s'entendrait] bien", pas loin de Montélimar "dans un village où tu peux boire les coups le soir, manger dans de bons restos et avoir un beau petit rôle dans un beau petit film avec des acteurs sympas".
Souvenir d'un Oscar
Jean Dujardin pourrait être pris comme un énorme paradoxe, ou tout simplement comme un acteur talentueux qui se dévalorise face à l'immensité que personne n'arrive à mesurer. A voir son regard sur les Oscars, on découvre plutôt un acteur distant vis à vis de sa statuette, qu'il est à deux doigts de considérer "comme un trophée de judo". Lorsqu'il lâche son "putain" en direct après avoir reçu l'Oscar du meilleur acteur, Jean Dujardin évoque "de la joie, évidemment, mais aussi un grand soulagement" et la fin d'une campagne qui "n'a rien de naturel".
"Tu passes la majeure partie de ton temps à serrer des louches et à faire semblant", avoue-t-il sans concession, affirmant par ailleurs n'être proche d'aucun Américain, juste "proche de [sa] famille comme [il l"a] toujours été". "Physiquement, j'étais arrivé au bout ", confie-t-il après avoir reconnu qu'il n'avait pu profiter du succès des Infidèles, sorti en France le lendemain du sacre aux Oscars.
A croire que l'acteur français pourrait se mettre à chanter le Non, non rien n'a changé des Poppy's tant il s'évertue dans les colonnes de Première à déconstruire le mythe fantasmé d'Hollywood et de ses récompenses. Aucun doute, Jean Dujardin n'a pas pris la grosse tête, loin de là. "Il y a aussi beaucoup de jalousie", admet-il.
Une histoire de statuettes
Le hasard du calendrier faisant concorder la sortie de son prochain film français post-Oscar (Möbius) avec la cérémonie où il doit passer le relais à un autre acteur marquant, Jean Dujardin a cru bon de d'effectuer une mise au point, une fois le calme retombé. Ne souhaitant pas tomber dans le piège de "l'humilité forcée" alors que la promotion du film va débuter, celui qui se dit "très timide" ne sera pas le Dujardin des Oscars, constamment "en représentation".
Il a envie de jouer son meilleur rôle, celui du mec sincère. "Je ne demande pas à être jugé" clame-t-il alors beaucoup l'attendent au tournant pour Möbius, film d'Eric Rochant au casting international (Cécile de France, Tim Roth) où il campe un agent secret russe.
Dans cette année pleine, Jean Dujardin a tourné dans le Sud pour Möbius, il a croisé le "très sympa" Leonardo DiCaprio sur le tournage du Scorsese, et surtout il s'est offert un gros plaisir en retournant sur le petit écran avec une bande de potes pour Le Débarquement. Un programme long de deux heures, composé de sketches joués en direct autour de Jean Dujardin, Nicolas Bedos, Gilles Lellouche ou encore Guillaume Canet. Malgré des critiques divergentes, il y aura bien une suite. A croire que tout réussit à l'irrésistible Jean.