Après avoir été dans la salle lors de ce coup d'envoi, Purepeople.com ne peut qu'aller dans le sens du scénographe. Dans le rôle de Chicken, homme tourmenté et marginal, à moitié noir, entretenant des rapports plus que tendus avec son demi-frère Loth, qui lui, est blanc, l'Idole des jeunes, 68 ans, est impeccable.
L'intrigue se déroule durant les années 60, dans le Mississippi. Deux hommes se disputent la maison familiale ainsi qu'une femme, alors qu'un ouragan est sur le point de ravager la région. Au début du spectacle, il apparaît dans une séquence filmée coup de poing, dans laquelle le public le découvre en héros bourru, avec un visage marqué au charisme prenant. Se succèdent ensuite des scènes jouées avec justesse et rythme.
Si les critiques du Paradis sur Terre sont ce mercredi matin assez moyennes - Le Parisien qualifie le ton de Johnny de "monolithique", et la pièce de "comédie un peu grasse" -, nous nous y opposons. Les deux heures de spectacle sont extrêmement savoureuses, la prestation du rockeur, parfait dans un rôle taillé à sa mesure - des conditions de jeu que d'autres, monstres sacrés comme Depardieu ou Arditi, connaissent également -, et vêtu d'une chemise à carreaux et d'un pantalon près du corps, est épatante, face à des acolytes de jeu très talentueux. Des comédiens formidables et habitués des planches, face auxquels Johnny Hallyday n'a absolument pas démérité. Il n'y avait aucune différence entre ce "jeune acteur" et ses deux complices.
Sur la scène du Théâtre Edouard-VII, le public, composé certes de fans de l'interprète de Que je t'aime mais également d'amateurs de théâtre venus voir une pièce avant tout, a découvert un Johnny acteur, qui n'a laissé aucune confusion avec le Johnny chanteur que le monde connaît depuis cinquante années. Jack Lang, Line Renaud, François Berléand, Jean-François Stevenin entre autres, et, bien évidemment, Laeticia Hallyday, l'ont applaudi à tout rompre. Ce mélange et ce choc des cultures ont été un vrai plus pour porter la salle. Johnny Hallyday connaissait son texte "au cordeau", sans aucune hésitation, avec le ton et les variantes nécessaires à l'intrigue. Pendant deux longs monologues, il ne fait aucune faute. Il est SANS oreillette, sans souffleur, sans prompteur et sans anti-sèches, n'en déplaise à ceux qui se sont gaussés à l'avance. Il a bossé, ça se voit, ça s'entend, et il a vraiment réussi son pari : "J'ai envie de faire des choses que je n'ai pas encore faites avant que je ne puisse plus les faire", avait-il déclaré.
Les critiques de quelques journalistes ce matin ressemblent à un certain parisianisme mondain, qui se tord la bouche pour ne pas reconnaître le talent et le travail du comédien de théâtre qui est né hier, à 68 ans, sur les planches de l'Edouard VII. longuement applaudi. Standing ovation pour Johnny, Audrey Dana (époustouflante !) et Julien Cottereau (un rôle difficile qui ne le met pas en valeur et dans lequel il excelle), et de nombreux rappels, plus que mérités. Un Johnny humble, discret, tenant ses partenaires par la main, les faisant applaudir par le public. Bernard Murat a rejoint ses comédiens pour le dernier salut, très ému.
Il était étonnant de voir le public présent, particulièrement les fans, faire preuve d'un tel respect pour le comédien. Peu après la fin de la représentation, le public était encore sur cette jolie place Edouard VII - certains interrogés par les journalistes de télévision et radios pour donner leurs premières impressions - quand Johnny, entouré d'Audrey et de Julien, est apparu devant la porte des coulisses et leur a lancé "Alors, ça vous a plu ?", un peu inquiet et presque timide. Accueilli par des bravos et des applaudissements nourris (mais pas par la folie habituelle des après-concerts, pas de gardes du corps impressionnants), on a pu prendre toute la mesure de l'importance de cette performance, pour lui... et pour nous.
Le Paradis sur Terre de Tennessee Williams doit se jouer 72 fois... il semble difficile, même si la demande est grande, que la pièce soit prolongée en raison de la tournée que doit préparer le chanteur.
Un mot : foncez ! Réservez vos places de théâtre sur le site officiel du Théâtre Edouard VII.