C'est une année historique pour l'abbaye de Westminster et l'archevêque de Canterbury Rowan Williams. Après avoir marié en avril dernier le probable futur monarque anglais au cours de ce qui apparaît comme "le (nouveau) mariage du siècle", Rowan Williams dirigeait mercredi 16 novembre 2011 à Westminster un office exceptionnel célébrant le 400e anniversaire de la Bible du roi Jacques (King James Bible ou couramment KJB, en anglais), dont la première édition, fruit d'un travail de traduction colossal et épineux de la Bible en anglais, fut publiée en 1611 sous le règne de Jacques Ier d'Angleterre.
La reine Elizabeth II, gouverneur suprême de l'Eglise d'Angleterre, son époux le duc d'Edimbourg et leur fils le prince Charles assistaient à la cérémonie, se recueillant autour de la puissance fondatrice de ce texte qui a incroyablement influencé la langua anglaise, laquelle, via des siècles de littérature et aujourd'hui encore, en porte les marques, qu'il s'agisse de syntaxe ou d'expressions idiomatiques (les équivalents anglais de "la prunelle de ses yeux", "mordre la poussière" ou "le sel de la terre" et bien d'autres intraduisibles en français en sont des héritages). La duchesse Camilla Parker Bowles, épouse du prince Charles qui peine à se débarrasser d'un tatouage au henné reçu en cadeau lors de leur visite en Tanzanie, satisfaisait de son côté à une autre obligation, remettant le Joanna Award 2011 à Clarence House au cours d'une réception de personnels, acteurs et partisans du Unicorn Theatre.
Monseigneur Rowan Williams a souligné l'importance "extraordinaire dans le temps" de la bible dont Jacques Ier d'Angleterre, levant la peine de mort applicable à la traduction du texte sacré, avait commandé en 1604 la traduction - pour aboutir en 1611 à l'abbaye de Westminster à la version dite "autorisée". "La tentation est toujours forte, pour le traducteur moderne, de chercher des stratagèmes pour rendre le texte plus accessible, et quand cette tentation se présente, cela ne fait pas de mal de se pencher pendant un moment - pendant de longs moments, même - sur ce texte extraordinaire", a exalté l'archevêque, tandis que le professeur Pauline Croft, spécialiste de la Bible King James, a imaginé avec esprit, devant son auditoire, que les traducteurs du XVIIe siècle, au nombre de 54 répartis en six collèges, contemporains de Shakespeare, auraient pu aller solliciter l'avis du dramaturge en cas d'angoisse.
Le doyen de Westminster, John Hall, a remarqué que le texte, dont d'anciennes copies ont été présentées durant l'office, avait mis du temps pour s'imposer mais qu'il fut, jusqu'à cinquante ans en arrière, l'unique traduction de la Bible connue des anglophones. Et, partant, le livre le plus vendu de l'histoire.
La cérémonie de ce 16 novembre à Westminster a également été l'occasion de célébrer la "People's Bible", une bible manuscrite participative écrite de la main de plus de 22 000 personnes dans toute la Grande-Bretagne. Les premiers versets avaient été copiés par le prince Charles, le Premier Ministre David Cameron et des comédiens réputés.