Il y a près de dix ans, l'actrice Maria Schneider revenait sur le tournage du film culte Le Dernier Tango à Paris, réalisé en 1972 par Bernardo Bertolucci, avec Marlon Brando en tête d'affiche. La comédienne, décédée en 2011, s'exprimait notamment sur une scène en particulier avec l'acteur mythique, un viol par sodomie où du beurre sert de lubrifiant. Ses propos remontent à la surface depuis que le magazine Elle (version américaine) a mis en ligne une vidéo datant de 2013, dans laquelle Bernardo Bertolucci admet avoir prévu avec son acteur principal cette scène, sans avertir la comédienne.
Bernardo Bertolucci, à qui l'on doit également 1900 ou encore Le Dernier Empereur, déclarait ainsi : "La scène du beurre est une idée que j'ai eue avec Marlon le matin-même." Il a précisé qu'il n'avait pas prévenu Maria Schneider, souhaitant qu'elle garde sa "spontanéité" face à la situation : "Je voulais qu'elle réagisse comme une fille, et pas comme une actrice. [...] Ensuite, elle m'a haï toute sa vie."
En effet, Maria Schneider, âgée de 19 ans au moment du tournage, avait confié au Daily Mail en 2007 avoir été prise au dépourvu : "Cette scène n'était pas dans le script original. La vérité, c'est que Marlon est venu me voir avec cette idée. Ils [le réalisateur et l'acteur] ne m'en ont parlé seulement avant qu'on tourne la scène, j'étais furieuse. J'aurais dû prévenir mon agent ou alors demander à un avocat, car on ne peut pas forcer quelqu'un à faire quelque chose qui n'est pas dans le script. Mais à l'époque, je ne savais pas. Marlon m'a dit : 'Maria, ne t'inquiètes pas, c'est juste un film.' Mais pendant le tournage, même si ce que Marlon faisait n'était pas réel, mes larmes étaient vraies. Je me suis sentie humiliée et pour être honnête, j'ai eu un peu l'impression d'être violée, par Marlon et par Bertolucci. Après cette scène, Marlon ne m'a pas consolée ou ne s'est pas excusé. Heureusement, il n'y a eu qu'une seule prise."
Le début d'une descente aux enfers
Dans cette interview, la comédienne abordait aussi la nudité dans le film qui ne l'a pas gênée, précisant que sa relation avec la star était plutôt du type père-fille : "Il n'y avait aucune attraction entre nous." Ce film sulfureux a ensuite braqué les projecteurs sur la jeune femme qu'elle était. Une situation difficile pour Maria Schneider qui a sombré dans la dépression et a tenté de se suicider : "[Ça] m'a rendue dingue. J'ai pris de la drogue - de l'herbe, puis de la cocaïne, du LSD et de l'héroïne -, comme pour fuir la réalité. C'était les années 1970, il y en avait partout. Je n'ai pas du tout aimé être célèbre et la drogue me permettait de m'échapper. J'ai pris des médicaments et j'ai essayé de me suicider, mais j'ai survécu car Dieu a décidé que ce n'était pas mon moment. J'imagine que ça a été comme un suicide quand j'ai fait deux ou trois overdoses, mais à chaque fois, je me suis réveillée quand l'ambulance arrivait." Fille du mannequin Marie-Christine Schneider et de l'acteur Daniel Gélin qui ne la reconnaîtra jamais, Maria Schneider est morte en 2011, succombant à un cancer généralisé, à 58 ans. C'est à ce moment que le réalisateur Bertolucci lui a "demandé pardon" pour ce qu'il lui a infligé avec un film qu'on peut sans mal qualifier de maudit.
Plusieurs artistes ont pris la parole sur les réseaux sociaux pour manifester leur colère et dégoût, parmi eux : Evan Rachel Wood - qui vient de s'exprimer sur deux viols qu'elle a subis dans sa jeunesse -, Chris Evans (Captain America) et Jessica Chastain. Cette dernière, toujours très engagée, a ainsi écrit : "Pour tous ceux qui adorent ce film, vous regardez une jeune femme de 19 ans en train de se faire violer par un vieil homme de 48 ans. Le réalisateur a planifié ce viol. C'est à vomir."