Vingt-trois ans après le meurtre sauvage de la productrice Sophie Toscan du Plantier, partie en vacances dans sa résidence irlandaise en décembre 1996, l'Irlande doit se pencher sur l'extradition vers la France du présumé coupable, l'Anglais Ian Bailey. Jugé l'an dernier par la cour d'assises de Paris, en son absence, il a été condamné à vingt-cinq ans de prison. Encore libre, et alors qu'il dément être le tueur, il a accepté de parler à Paris Match.
C'est depuis Schull, dans le comté de Cork, non loin de le demeure devenue scène de crime de la regrettée Sophie Toscan du Plantier, que Ian Baily a reçu le magazine. Il vit toujours dans les environs et, en mai prochain, Dublin pourrait bien décider de l'extrader vers la France pour qu'il purge sa peine. Interrogé et arrêté plusieurs fois, dès 1997, il n'a jamais été officiellement inculpé en Irlande, faute de preuves concrètes. Il faut dire que le cadavre de la productrice était resté trente-six heures dans son jardin avant d'être analysé par un médecin légiste... De quoi rendre difficile l'enquête et ce même si Ian Bailey aurait confessé le crime, ivre, et était apparu avec des traces de lutte sur le corps. Quant à ses articles sur le meurtre, publiés à l'époque dans la presse locale, ils contenaient d'étranges détails connus que de la police... ou du meurtrier.
Désormais diplômé en droit - il a passé trois diplômes différents - , pour se préparer à se défendre face à la justice française et anglo-saxonne, Ian Bailey (63 ans) semble avoir presque épuisé toute ses cartouches pour s'en sortir. Il n'y a d'ailleurs aucune autre piste que lui et, pourtant, il cherche à mettre la lumière ailleurs : sur Daniel Toscan du Plantier, le défunt mari de Sophie, qui a succombé à une crise cardiaque en 2003 ! "Je tiens de deux sources indépendantes que Sophie avait souscrit une assurance-vie... et pas une petite somme", a-t-il clamé, sous-entendant que le regretté producteur pourrait être lié à ce meurtre.
Tenant un discours confus, Ian Bailey - qui vit toujours avec sa compagne Jules Thomas, qui l'avait accusé de violence physique dans le passé - accuse aussi un autre mort... "Des informations me parviennent régulièrement prouvant à l'évidence que le meurtrier était un ancien flic dénommé John O'Donnell, hélas décédé depuis", a-t-il confié. Difficile pour les morts de se défendre... Paria dans son village, banni du journalisme, Ian Bailey aujourd'hui les marchés et écrit de la poésie. Celui que les psychiatres avaient décrit comme avide de reconnaissance affirme ne pas vivre avec le fantôme de Sophie même s'il lui arrive de penser à elle. S'il refuse de penser à ce que sa vie aurait été sans cette accusation, sa compagne Jules tient un autre discours... pas vraiment à l'avantage du présumé coupable. "S'il avait avoué il y a vingt-trois ans, il aurait déjà purgé sa peine. Et serait sorti", a-t-elle lâché. Mais puisqu'il vous dit qu'il n'a rien fait...