Décédé au petit matin de ce dimanche 5 janvier, Eusébio, la légende du ballon rond portugais aura le droit à des funérailles à la hauteur de son talent. Un talent reconnu sur toute la planète et salué par le monde du football depuis l'annonce de sa mort.
Deuil national
L'émotion est telle que le gouvernement portugais a décrété trois jours de deuil national en hommage à Eusébio qui a "son nom gravé en lettres d'or dans le livre du football mondial", a déclaré Luis Marques Guedes, porte-parole du gouvernement dans des propos rapportés par l'AFP.
Le corps de la Panthère Noire, le surnom de ce footballeur aux qualités athlétiques hors du commun originaire du Mozambique, était exposé au stade de la Luz ce dimanche 5 janvier après-midi, le stade du Benfica Lisbonne, club où il passa 15 années de sa carrière et avec qui il décrocha 11 titres de champion du Portugal, 4 coupes nationales et une coupe d'Europe des clubs champions en 1962. "Eusébio a contribué au rayonnement de son pays dans le monde. Le Portugal lui doit beaucoup en tant qu'ambassadeur du sport national. Je pense que le deuil des Portugais s'étend à tous les pays africains de langue portugaise, d'où Eusébio était originaire, ainsi qu'à toutes les parties du monde où il y a des communautés portugaises", a ajouté M. Marques Guedes à la radio TSF.
Une légende aimée de tous
Véritable idole en son pays, Eusébio da Silva Ferreira, décédé à l'âge de 71 ans, avait su se faire aimer et respecter de tous ses adversaires lors de ses innombrables rencontres à travers toute l'Europe. On se souviendra ainsi de son geste face à Manchester United en 1968 en finale de la coupe d'Europe des clubs champions, où il avait chaleureusement applaudi le gardien de but Alex Stepney, qui venait de remporter un face à face décisif face à l'un des plus grands joueurs de tous les temps. "Le fait qu'il soit resté là à m'applaudir avant de partir est la marque de l'homme. Il respectait tout ce qu'on faisait - et j'aime à croire qu'il était le même en dehors du foot", a commenté Alex Stepney en apprenant la mort d'Eusébio.
Eusébio a rivalisé avec les plus grands joueurs de l'histoire de son époque, à l'image des Pelé, Charlton ou encore di Stefano, son idole qu'il affronta lors de la finale de la coupe d'Europe des clubs champions en 1962, un match qui est depuis devenu légendaire. Alors que l'on ne donnait pas cher du Benfica face à l'armada du Real Madrid qui comptait dans ses rangs outre Alfredo di Stefano, Ferenc Puskas, l'un des meilleurs joueurs de tous les temps, le Benfica l'emporta 5-2. Auteur d'un doublé, le môme de 20 ans s'installait au sommet de l'Europe, mais lui n'avait qu'une idée en tête, récupérer le maillot de son idole, Di Stefano. Et celui-ci n'a pas manqué de lui rendre hommage ce dimanche, et pas n'importe comment : "Pour moi, Eusébio sera toujours le plus grand joueur de tous les temps."
Pluie d'hommages
Ils sont nombreux à rendre hommage à celui qui jamais ne se lança pas dans la politique, mais qui fut lui même l'objet de combines politiciennes lorsque le dictateur Antonio Salazar l'avait empêché de rejoindre l'Inter Milan pour en faire, à l'instar de la diva de la chanson Amalia Rodrigues, une des icônes du Portugal des "trois F": fado, football et Fatima.
José Mourinho, le plus célèbre des entraîneurs européens, a salué la mémoire du joueur : "Je pense qu'il est immortel. Il est plus qu'une grande figure du football, il est le Portugal, un grand seigneur de notre pays. C'était une référence importante, dans sa vision du football, ses valeurs, ses principes, ses émotions et cela même après la fin de sa carrière. Si on tente de comparer avec le football actuel, Eusébio serait au niveau des meilleurs. S'il avait eu 20 ou 30 ans aujourd'hui, il aurait eu un niveau étincelant." Son compatriote Cristiano Ronaldo, buteur du Real Mardid, a simplement publié une photo de lui et la légende, accompagné d'une phrase, "Eusébio, éternel à jamais. Repose en paix", alors que le club espagnol a décidé de respecter une minute de silence et de faire porter à ses joueurs un brassard noir.
Michel Platini a lui aussi salué "l'un des plus grands joueurs de tous les temps" rappelant que si "sur la pelouse, Eusébio était une légende, que ce soit sous le maillot du Portugal ou de Benfica", "en dehors, il était plus qu'un footballeur, il était un homme bon et charmant".
Une qualité que l'on retrouve dans les messages publiés par les anciens joueurs de Manchester United, chez qui il était particulièrement apprécié. ManU a salué "un joueur fantastique et un ami du club". Sir Bobby Charlton, légende de ManU a lui aussi rendu hommage à la légende : "Eusébio a été l'un des meilleurs joueurs contre qui j'ai eu le privilège de jouer. (...) Je suis fier d'avoir été à la fois son adversaire et son ami et je suis attristé d'apprendre son décès. Mes pensées et mes prières vont à sa famille en ce moment difficile."
Sepp Blatter, le patron controversé de la Fédération internationale de football : "Le foot a perdu une légende, mais Eusébio gardera à jamais sa place parmi les plus grands." Franz Beckenbauer, la légende du foot allemand, a lui publié un message sur les réseaux sociaux : "Un des plus grands joueurs de tous les temps s'en est allé." Gary Lineker, l'un des joueurs les plus fair-play et les plus élégants que l'Angleterre ait connu a salué la mémoire d'un des "meilleurs de sa génération".
"J'ai été meilleur joueur du monde, meilleur buteur du monde et d'Europe. J'ai tout fait, sauf gagner un Mondial", disait Eusébio dans une interview fin 2011, se rappelant encore des larmes versées après la demi-finale perdue par le Portugal face à l'Angleterre (2-1), pays-hôte, au Mondial de 1966, où il a laissé une image inoubliable. "Eusébio était un gentleman, quelqu'un de très respectueux des autres malgré son immense talent", déclarait Nobby Stiles, ancien international anglais qui l'avait affronté avec Manchester United.
Josef Masopust, Ballon d'Or 1962 et ancien international tchècoslovaque, se souvient avec émotion de celui qu'il avait devancé dans le classement de la prestigieuse récompense : "Je suis très triste. Encore un grand ami qui est parti. C'est lui qui était le premier à me féliciter pour le Ballon d'Or 1962."
Eusébio da Silva Ferreira, décédé ce matin d'un arrêt cardio-respiratoire sera enterré lundi au cimetière de Lumiar, dans la banlieue nord de Lisbonne, a annoncé son ancien club Benfica. Conformément à ses dernières volontés, son cercueil fera le tour du stade de la Luz, le stade du Benfica, où ses supporteurs pourront rendre un dernier hommage avant une messe en l'église du Séminaire.