C'est avec une grande tristesse que beaucoup ont appris le décès de l'académicien Jean Dutourd. L'écrivain et essayiste s'est éteint lundi à l'âge de 91 ans, à son domicile parisien. Ancien résistant, prix Stendhal en en 1946 pour Le Complexe de César, Prix Interallié en 1952 pour son roman Au Bon Beurre, Jean Dutourd intègre l'Académie française en 1978.
Nicolas Sarkozy lui a rendu hommage dans un communiqué : "Chez Jean Dutourd, résistant et intime de Gaston Bachelard, la provocation n'a jamais éclipsé l'engagement et la profondeur de la pensée." Le ministre de la culture Frédéric Mitterrand lui emboîte le pas, saluant ce "défenseur ardent et inspiré des lettres françaises" : "De sa plume acerbe d'écrivain depuis 1946, comme de la pointe de son épée d'académicien depuis 1978, ce brillant styliste défendait la langue française des attaques extérieures avec la même vigueur que, grand résistant, il avait défendu Paris et sa patrie", a souligné le ministre dans un communiqué. Jean Dutourd "incarnait à sa manière l'esprit français, ce territoire familier où Balzac n'est jamais très loin de [Claude] Chabrol".
Réputé pour son anti-conformiste et son franc-parler, Jean Dutourd avait rejoint l'équipe de Philippe Bouvard et des Grosses Têtes. L'animateur, lui-même amoureux de la langue française, a eu des mots touchants pour son ami, patriarche de l'émission : "C'était notre bonne conscience culturelle. De temps en temps nous l'entraînions dans nos facéties, mais nous lui devons beaucoup car il a donné aux Grosses Têtes leurs lettres de noblesse (...) Jean Dutourd savait tout sur tout, et dans l'ordre. On pouvait l'interroger sur n'importe quoi et en même temps il était resté non seulement simple et surtout extrêmement joyeux. C'est à la fois un homme couvert d'honneur et iconoclaste."
Philippe Bouvard lui a naturellement consacré une émission spéciale cette après-midi sur RTL, où ses anciens camarades des Grosses têtes, ont chacun évoqué la mémoire de Jean Dutourd.
Jacques Ballutin se souvient que son érudition l'éblouissait. Guy Bedos se dit touché : "Je l'avais un peu perdu de vue et l'annonce de sa disparition ne m'a pas laissé indifférent..." Isabelle Mergault souligne son ouverture aux autres : "C'était le couple improbable lui et moi. Il avait un talent d'écriture incroyable, mais il avait aussi beaucoup d'humour et puis il acceptait ceux qui n'avaient pas sa culture... C'est pour ça que je me sentais à l'aise, je ne me sentais pas jugée... Quand on ne connaissait pas, il vous expliquait, il vous donnait envie de lire..."
Macha Méril loue sa "vivacité", son "humour féroce", sa "modestie" aussi. "Avec lui part un grand gentleman, un grand amoureux des femmes", confiait-elle.
Amanda Lear évoque son visage : "Il avait toujours cet oeil très pétillant, très rieur, moi c'est ça qui me fascinait chez Dutourd, c'est qu'on aurait dit toujours qu'il riait parce qu'il avait ces petits yeux très malins et puis cette moustache toujours coquine, frémissante. Il était toujours alerte..." Francis Perrin aussi se souvient de ce regard : "Moi ce qui me plaisait c'était ses petits yeux malins qui avaient toujours l'air de faire une farce... Et derrière, une grande élégance, parce qu'il ne se prenait pas au sérieux alors qu'il avait toutes les raisons de le faire..."
Et Francis Perrin de nous offrir la conclusion idéale : "J'étais très très heureux d'avoir croisé un homme comme ça. Avec Jean Dutourd, on ne perdait jamais son temps..."