Le compteur a explosé, l'expérience est un franc succès : en orchestrant une véritable révolution dans le mode de communication de Mylène Farmer, Polydor a fait, non sans prise de risque, un beau boulot en amont de la sortie événement - le 6 décembre - de Bleu noir, huitième album studio de l'artiste.
La divine rouquine ayant opté pour le vent de la révolte, en délaissant exceptionnellement son complice et pourvoyeur de tubes de toujours Laurent Boutonnat pour tenter l'aventure hype d'une collaboration avec le producteur RedOne (starisé par sa contribution à l'album The Fame de Lady Gaga), il fallait bien oser un dispositif d'une audace proportionnelle. Option choisie : mettre en avant Mylène Farmer. La montrer, volontaire, sous toutes les coutures. L'offrir en pâture à la nature du web, qui palpite et nourrit ses ouailles de teasers, de leaks, de pics, de tout ce qui devrait rester secret mais n'y parvient pas.
En somme, montrer celle qui a toujours refusé de se montrer - c'est ainsi qu'on découvrait récemment des images étonnantes de Mylène Farmer en studio (une première !) avec Ben Harper pour leur duo hommage à INXS (vidéo ci-dessus). Dévoiler plus que jamais celle qui, en 25 ans d'une carrière exemplaire, doit son aura à nulle autre comparable à un mystère impénétrable, une évanescence sulfureuse, un mysticisme vénéneux. Pour Bleu noir, sur lequel la chanteuse est fière d'enregistrer les apports d'Archive ou de Moby (dont on a découvert dernièrement le titre Toi l'amour concocté pour la Française), c'est donc un site Internet dédié et éphémère qui a été pensé, dont l'attrait des fans et des curieux fut le moteur : à mesure des visites, de nouveaux éléments étaient révélés. A chaque étape, la découverte suivante en point de mire.
La chasse au trésor semble avoir pris fin : avec le palier colossal des 400 000 visiteurs uniques franchi allègrement, c'est le clip de Leila, signé Alain Escalle (complice vidéaste de ses tournées de 2006 et 2009, dont vous pouvez visiter le site ici), qui est désormais visionnable sur www.mylenefarmer-bleunoir.com. Un titre où l'on reconnaît aisément l'atmosphère climatique et éthérée d'Archive, entre lancinement, couleur glaciaire et légèreté mélancolique, et où la voix de Mylène Farmer joue de plusieurs saisons - fêlures, voix de tête et fioritures orientalisantes. Entêtant.
Le clip, dont l'univers se situe aux antipodes du clip liminaire (celui proposé pour Oui mais... non, le premier single signé RedOne), illustre avec inspiration cet envoûtement musical, sans mettre en scène la chanteuse pour le coup, pour un voyage audiovisuel marquant.
La seule déception, au final, c'est qu'il semblerait que cette treizième étape soit, superstition ou pas, la dernière...
G.J.