À Pretoria, le tribunal d'instance étudie la demande de remise en liberté sous caution d'Oscar Pistorius. Dans le Sud du pays, à Port Elizabeth, se tiennent les obsèques de sa victime, Reeva Steenkamp. C'est une longue journée qui s'annonce pour les familles de l'ex-héros handisport et du jeune mannequin, qui a péri sous ses coups de feu. Si de nombreux journalistes faisaient le pied de grue ce matin devant le tribunal, seuls 26 d'entre eux ont pu pénétrer dans la minuscule salle d'audience.
Meurtre avec préméditation
Mardi 19 février, Oscar Pistorius est arrivé très tôt au tribunal de Pretoria. Inculpé de meurtre, le sportif, héros des récents Jeux olympiques de Londres pour avoir été le premier double amputé à s'aligner sur les épreuves du 400 mètres des valides, plaide la thèse de l'accident mais ne donne toujours pas sa version des faits. Ce n'est cependant pas l'avis du redoutable procureur Gerrie Nel qui retient la "préméditation".
Il "a tiré et a tué une femme innocente non armée. Il a tiré quatre fois, a expliqué le procureur. La victime a été touchée trois fois alors qu'elle était aux toilettes" et "la porte des toilettes a été défoncée depuis l'extérieur. Nous pensons que la porte était fermée à clé", a-t-il affirmé, soulignant qu'il "n'y avait que deux personnes dans la maison cette nuit-là". Quand la quatrième balle a-t-elle été tirée ? Une certitude pour le procureur : l'accusé "a mis ses prothèses, marché sept mètres et fait feu".
Accident
Vêtu d'un costume sombre, d'une chemise bleue et d'une cravate grise, Oscar Pistorius regardait fixement droit devant lui, murmurant parfois comme s'il priait. Sa famille a ses côtés, assise quelques rangs derrière.
Oscar Pistorius a fondu en larmes et sangloté doucement lorsque son avocat Barry Roux a contesté la qualification de "meurtre", faisant référence à "d'autres affaires où des maris ont tiré sur leur épouse par accident en pensant à un intrus". "Il n'y a aucun élément indiquant la moindre préméditation. Tout ce que nous savons, c'est qu'elle s'est enfermée dans les toilettes. Elle a été tuée dans les toilettes (...) il a pensé qu'elle était un intrus", a précisé l'avocat, évoquant "la mort prématurée et malheureuse de Reeva Steenkamp".
"Pourquoi un voleur s'enfermerait-il dans les toilettes ?", rétorque le procureur.
Libération compromise
Cette audience devrait durer deux jours et ne concerne que la demande de mise en liberté sous caution d'Oscar Pistorius. Le juge Desmond Nair estime qu'il ne peut écarter la préméditation pour le moment, cette décision rend quasi impossible la libération de Pistorius sous caution. À moins que sa célébrité ne joue en sa faveur... Héros sud-africain et même international, il lui serait difficile de prendre la fuite sans être repéré. Reste à prendre une décision. Le combat s'annonce difficile puisqu'il oppose le procureur le plus redouté du pays à deux cadors du barreau.
Selon le quotidien The Times, les enquêteurs ont procédé à des analyses pour déterminer si des traces d'activités sexuelles dans la chambre de l'athlète dataient de cette nuit-là, et de qui elles provenaient. Ils se demandent aussi, selon la même source, pourquoi la voiture de Pistorius n'était pas comme d'habitude dans le garage, ses clefs étant restées sur le contact.
À l'autre bout du pays, à Port Elizabeth, la famille et les amis de Reeva Steenkamp sont réunis pour lui dire adieu au crématorium de Victoria Park. Le cercueil recouvert d'un drap et d'une composition de fleurs blanches est arrivé sur place vers 10h. Gavin Venter, un ami de la famille a qualifié la jeune femme d'ange. "J'ai demandé à son père, il m'a dit que non, qu'elle était très heureuse avec Oscar, qu'il n'y avait pas de problème. Mais peut-être qu'elle cachait quelque chose", a-t-il déclaré aux journalistes. Puis il a attaqué Pistorius : "C'est un danger pour la société. Il serait dangereux pour des témoins, il doit rester en prison, ils ne doivent pas le relâcher." C'est justement ce dont discutent le procureur et la défense à l'heure qu'il est... Réponse peut-être dès ce mardi soir.