D'une nuit de Saint-Valentin à une nuit de cauchemar. En tuant sa compagne Reeva Steenkamp, Oscar Pistorius s'est retrouvé au coeur d'un emballement médiatique aussi soudain que brutal, à l'image de la frénésie qui avait accompagné ses débuts avec les valides.
La naissance d'une star
Car outre ses performances extraordinaires sur la piste lors des compétitions paralympiques, Oscar Pistorius était devenu une icône et un modèle pour des millions de personnes. Amputé des deux jambes sous les genoux à l'âge de 11 mois, le Sud-Africain a toujours voulu faire partie du monde des valides, cachant son handicap et dissimulant ses prothèses lorsqu'il se mesurait aux valides sur les pistes d'athlétisme.
Son entraîneur Jannie Brooks avait ainsi raconté comment il n'avait découvert qu'au bout de six mois que son poulain était amputé des deux jambes... Il s'était inscrit avec un groupe d'amis à des sessions de préparation physique, ne disant rien de son handicap. Réalisant les mêmes performances que les valides, son coach ne se doutait de rien, l'hiver et le froid obligeant les athlètes à se couvrir les jambes. Une anecdote révélatrice de la volonté et de la personnalité d'Oscar Pistorius...
Icône mondiale
Dominateur dans le monde du handisport (records du monde du 100, 200 et 400m, 4 médailles d'or aux Jeux paralympiques d'Athènes en 2004 et de Pékin en 2008), le jeune athlète avait demandé il y a quelques années à disputer les mondiaux de 2011 aux côtés des valides. Il lui aura fallu plusieurs mois de batailles et de rapports sur ses prothèses pour obtenir l'autorisation tant attendue. Des prothèses spécialement conçues pour lui, d'une valeur de 20 000 euros et qui lui vaudront le surnom de Blade Runner. Et même s'il échoue en demi-finale du 400m, sa performance est une victoire en soi, porteuse d'un message d'espoir pour tous les handicapés du monde.
Dès lors, Oscar Pistorius devient une véritable idole. Les marques en font leur égérie, comme Thierry Mugler ou Nike. En Afrique du Sud, une chaîne de télé, M-Net Movies, le choisit comme ambassadeur. Il fait le tour du monde, est célébré dans tous les pays, où il suscite l'admiration. Sa gentillesse associée à sa belle gueule en font l'une des personnalités préférées du public et des médias. On le retrouve ainsi en Italie, démontrant ses talents de danseur lors de l'émission Danse avec les stars, en Écosse, où il est fait docteur honoraire de l'université de Strathclyde à Glasgow, en France, où il est l'invité du Grand Journal de Canal+...
Sa participation aux Jeux olympiques de Londres avait un peu plus accentué sa popularité. Kate Middleton et le prince William lui avaient ainsi réservé un accueil unique, comme tout le stade. Ses adversaires lui avaient également rendu un magnifique hommage, alors qu'il venait d'échouer en demi-finale du 400m. Le futur vainqueur, Kirani James, s'était notamment précipité vers lui pour lui demander son dossard, une image restée dans les mémoires.
Accusé du meurtre de sa compagne
Mais le charisme d'Oscar Pistorius ne lui sera pas d'un grand secours. Car depuis ce jeudi 14 février, 4h du matin heure locale, le jeune homme est au coeur d'une sordide affaire. Accusé du meurtre de sa compagne, la jeune et prometteuse mannequin Reeva Steenkamp, retrouvée avec quatre balles dans le corps, Oscar Pistorius sera présenté demain (vendredi) devant un juge de Pretoria qui lui signifiera les charges qui pèsent contre lui. Et la thèse de l'accident un premier temps émise par la presse locale - il aurait pris sa compagne, venue le surprendre pour la Saint-Valentin, pour un cambrioleur- a été balayée par le parquet. Car des éléments troublants ont été peu à peu révélés tout au long d'une journée riche en rebondissements.
Un passif qui ressurgit
Selon les médias sud-africains citant une porte-parole du parquet, les forces de l'ordre seraient intervenues à plusieurs reprises chez le coureur pour des disputes conjugales. En outre, on apprend qu'Oscar Pistorius était un amateur d'armes à feu, qu'il dormait avec son arme à proximité, et que lorsqu'il était victime d'insomnies, il s'entraînait au tir. On apprend également qu'en 2009, il avait été placé en garde à vue après qu'une femme avait porté plainte, l'accusant de l'avoir violentée. Oscar Pistorius s'en était alors sorti avec un simple avertissement de la justice, la jeune femme ayant admis par la suite avoir consommé de l'alcool et donné des coups à la porte de la maison d'Oscar Pistorius, alors que celui-ci lui avait demandé de partir...
Si la présomption d'innocence est bien évidemment de mise, l'image d'Oscar Pistorius en a déjà pris un coup. La chaîne M-Net Movies a retiré sa campagne où il apparaissait sous le slogan "Chaque soirée est une soirée d'Oscar". Nike, le sponsor de l'athlète, a également fait retirer une pub de son site internet, où l'on voyait l'homme au départ d'une course, accompagnée d'une petite phrase qui ne manquera pas d'alimenter les conversations dans les prochaines heures : "I am the bullet in the chamber." Soit en version française : "Je suis la balle dans le canon."