Double peine pour les victimes de violences sexuelles en Chine. Si les victimes renoncent le plus souvent à accuser leurs agresseurs, c'est tout simplement par peur de représailles des autorités et du gouvernement. La championne de tennis Peng Shuai en est la preuve vivante. Après avoir osé dénoncer l'ancien vice-Premier ministre Zhang Gaoli, qu'elle accuse de viol, elle est portée disparue. D'après Le Monde, la joueuse n'a pas donné signe de vie depuis plus d'une semaine.
On ignore où elle se trouve actuellement, et son message poignant a rapidement été censuré en Chine. Avec le hashtag #WhereIsPengShuai, la communauté du tennis s'inquiète sur les réseaux sociaux de son sort.
"Oui, ces accusations sont très inquiétantes. Je connais Peng depuis qu'elle a 14 ans, nous devrions tous être inquiets, c'est grave, où est-elle ? Est-elle en sécurité ? Toute information serait appréciée", écrit dimanche l'ex-championne américaine Chris Evert sur son compte Twitter.
La Française Alizé Cornet a également relayé samedi sur son compte le message #WhereIsPengShuai, en ajoutant "ne restons pas silencieux", tandis que le Britannique Liam Broady, reprenant le mot-dièse #WhereIsPengShuai également, a écrit dimanche : "Je ne peux pas croire que ce genre de choses arrive au 21e siècle".
Début novembre, Peng Shuai accusait sur les réseaux sociaux un ancien haut dirigeant communiste de l'avoir contrainte à une relation sexuelle, avant d'en faire sa maîtresse.
L'accusation explosive avait été brièvement postée sur le compte Weibo officiel de la joueuse chinoise de 35 ans, qui avait remporté en double le tournoi de Roland-Garros en 2014. Dans un long texte, Peng Shuai affirme avoir eu, il y a trois ans, un rapport sexuel forcé avec l'ancien vice-Premier ministre Zhang Gaoli, qui a été de 2013 à 2018 l'un des hommes politiques les plus puissants de Chine.
Mais la censure étant hélas monnaie courante en Chine, le message avait rapidement disparu de l'internet chinois. Dans la foulée, les recherches comportant à la fois les noms de Peng Shuai et Zhang Gaoli étaient toujours bloquées sur Weibo et sur le moteur de recherche Baidu. Le compte officiel de la joueuse était toujours actif mais les recherches avec son nom ne donnaient aucun résultat sur la plateforme.
L'AFP précise que la Chine a connu depuis 2018 une version très aseptisée du mouvement MeToo, avec des accusations de harcèlement sexuel visant des vedettes de la chanson ou du petit écran, mais jamais jusqu'ici de responsable politique. Zhang Gaoli, âgé d'environ 75 ans, était jusqu'au début de 2018 membre permanent du bureau politique du PCC et à ce titre l'un des sept hommes les plus puissants de Chine. Il est considéré comme proche du Premier ministre Li Keqiang.
Dans son message, Peng Shuai raconte que M. Zhang lui a imposé un rapport sexuel dans sa chambre après une partie de tennis, sept ans après avoir déjà couché avec lui. "J'avais très peur. Cet après-midi-là, j'ai d'abord refusé. Je n'arrêtais pas de pleurer", écrit-elle. "En proie à la peur et au trouble (...) j'ai cédé et nous avons eu un rapport sexuel". Elle ajoute que l'épouse de M. Zhang était au courant et "montait la garde à l'extérieur".
Peng Shuai précise qu'elle est ensuite devenue la maîtresse de l'ex-dirigeant, jusqu'à une dispute la semaine dernière. Elle ajoute n'avoir aucune preuve à apporter à l'appui de ses dires. "Tu as toujours eu peur que je cache un magnétophone", écrit-elle en s'adressant à M. Zhang. "Tu démentiras certainement ou bien tu iras jusqu'à m'attaquer".
Ancienne numéro un mondiale en double, Peng Shuai est actuellement classée 189e par la WTA. Véritable championne en simple comme en double, elle a remporté Roland-Garros en double en 2014 et Wimbledon en double en 2013. En simple, elle a atteint la 14e place mondiale au classement WTA et a remporté 4 tournois, de 2014 à 1018. En 2014, elle était arrivée jusqu'en demi-finale de l'US Open et s'était inclinée face à Caroline Wozniacki.