Alors que le capital patience s'épuise (le capital confiance est épuisé depuis longtemps), Raymond Domenech, spécialiste de l'anti-communication et de l'ironie glaciale indécryptable (Se fout-il de nous ? De tout ? Ou pas du tout ?), a trouvé avec L'Equipe TV une tribune spéciale pour s'exprimer.
Ce soir, à partir de 19 heures, la chaîne du quotidien sportif national diffusera la première partie de ce qu'il faut considérer comme "un autoportrait" du sélectionneur de l'Equipe de France. Le timing est bien choisi : dans quelques mois, Raymond Domenech ne sera plus le technicien tricolore en charge, et si la qualification "au courage" (voir, à ce titre, la version des parodieurs de 3615 Polyprod) des Bleus pour la Coupe du monde en Afrique du Sud a ménagé un sursis logique, les discussions vont bon train quant à l'identité de son successeur.
Une quarantaine de minutes au cours desquelles Domenech, cheveux au vent et truffe humide puisque Charles Biétry l'interrogera à bord d'un voilier quittant le port de Lorient, reviendra sur sa carrière de joueur, d'entraîneur, de sélectionneur...
L'Equipe annonce ce matin "des réponses dénuées de langue de bois, certaines déjà entendues certes, s'attribuant au passage quelques satisfecits sans doute, mais souvent pertinentes et drôles". On peut prédire que ce genre d'entretien où l'intéressé est à la barre devrait séduire ses supporteurs et agacer encore un peu plus ses (nombreux) détracteurs. "Sifflé par les uns, et applaudi par les autres", s'amuse-t-il en reprenant des commentaires trentenaires de Thierry Roland et Michel Drucker lorqu'il était joueur.
En guise d'avant-goût, le quotidien s'attarde notamment sur le traumatisme de la finale de la Coupe du monde 2006, abandonnée aux rivaux italiens à l'issue des tirs au but et après un coup de boule resté fameux. A ce sujet, Domenech commente : "Il a fait une erreur et il le sait. Moi, j'ai eu le tort de ne pas dire à Zizou ce que je voulais faire dans cette finale. J'aurais dû lui dire que j'allais le sortir à cinq minutes de la fin (dans l'esprit du sélectionneur, précise L'Equipe, s'il avait prévenu Zidane de ses projets, ce dernier n'aurait pas donné son coup de tête, dans l'attente du but de la victoire et de sa sortie du terrain). Parce que, pour moi, on allait marquer. Alors, je l'aurais sorti devant un milliard de téléspectateurs, 80 000 spectateurs, et même les Italiens l'auraient applaudi. C'est une vraie erreur, j'aurais dû le mettre dans la confidence". On se souvient alors du duel d'influence qui existait entre les deux hommes forts de la sélection tricolore...
Un mea culpa étonnant livré avec un plan a posteriori, truffé de spéculations difficilement concevables... Et, surtout, un mea culpa... qui n'est en pas un, et dont le but est de susciter celui du capitaine des Bleus de l'époque, Zinedine Zidane. Prémisses à la seconde partie de l'autoportrait, consacrée à sa période contemporaine de sélectionneur et diffusée jeudi prochain, ce pavé dans la mare : "J'espère simplement qu'un jour Zizou arrivera à dire qu'au fond il le regrette, qu'il n'aurait pas dû le faire, pour tous les gamins..."
On se le revisionne, ce coup de boule sur Materazzi, pour lequel Zidane avait présenté des excuses mais pas de regrets, estimant qu'il se devait d'encourager ses propres enfants à ne pas se laisser piétiner ? Rendez-vous ci-dessus. Avec, en bonus, la dernière provocation en date du détesté Marco Materazzi lors de la toute récente victoire de l'Inter dans le duel fratricide milanais : le joueur a mis un masque à l'effigie de Silvio Berlusconi (propriétaire du Milan AC) pour railler ses adversaires vaincus et leurs supporteurs, déclenchant une polémique... Toujours très classe...
Oh, ça, vraiment, Raymond, ce n'est pas fair-play... Se montrer quasi incapable d'auto-critique lucide et attaquer Zizou en mettant ces enfants auxquels il se consacre tant en première ligne, c'est moche. Bouh ! Domenech au confessionnal, ce sera encore pour plus tard.
G.J.