Sylvie Le Bihan est une écrivaine écorchée. La quinquagénaire native de Nice se livre à nouveau sur le viol collectif qu'elle a subi en 1983, alors qu'elle n'avait que 17 ans. Le but de son témoignage détaillé ? Appuyer le manifeste Marie Claire qui réclame que les victimes mineures de viols puissent porter plainte jusqu'à trente ans après leur majorité. Le mensuel féminin et des personnalités demandent aux députés de voter l'allongement du délai de prescription.
Tout comme l'animatrice Flavie Flament ou la styliste Agnès b., Sylvie Le Bihan témoigne sans honte aucune de l'agression dont elle a été victime et qui l'a marquée à jamais. Les faits remontent à plus de trente ans en arrière, lorsque l'épouse et collaboratrice du chef Pierre Gagnaire était "monitrice de colonie de vacances". Comme elle l'a précédemment raconté à Libération, Sylvie Le Bihan relate cette soirée passée à danser, cette douche qu'elle va prendre après la fête, suivie par trois inconnus dont elle ne détecte pas tout de suite la présence. "On peut difficilement imaginer la violence de la chose. Tout s'est effondré d'un coup, quand ils ont surgi et qu'ils m'ont violé, entourée de ces carreaux blancs de salle de bains. Je me souviens de tout, de ces visages. Mais je n'ai jamais su qui ils étaient. Je ne les avais jamais vus avant", témoigne l'auteur de L'Autre.
Sylvie Le Bihan n'a pas seulement été violée, elle a aussi été physiquement brisée, "une fracture ouverte de la jambe, des côtes cassées." Un gendarme lui conseille alors de ne pas porter plainte et d'oublier ce terrible épisode. Elle l'écoute, ses parents évitant eux aussi le sujet. "Je n'en veux pas à mes parents de ne pas avoir cherché à me faire parler, je ne sais pas non plus comment j'aurais réagi", avoue-t-elle. Puis tout resurgit trente ans plus tard, après autant d'années de déni.
Lors de l'écriture de son troisième livre, Qu'il emporte mon secret (éditions Seuil), Sylvie Le Bihan décide d'aborder la thématique du viol, une volonté qui a forcément remué des souvenirs enfouis. "Un viol, on ne s'en sépare jamais, on y pense tous les jours", confie-t-elle. Elle-même maman qu'une jeune fille, elle a craint pour elle l'année de ses 17 ans, au point d'en devenir paranoïaque : "Pendant un an, je suis allée la chercher à toutes ses soirées, à 4h du matin."
Aujourd'hui, Sylvie Le Bihan dit regretter de ne pas avoir porté plainte. "Je le ferais pour les autres, pour que ceux qui ont failli me détruire ne recommencent jamais", conclut-elle.
Parmi les premiers signataires du manifeste Marie Claire, l'ancienne ministre et animatrice radio Roselyne Bachelot, les actrices Zabou Breitman, Isabelle Carré, Audrey Dana, Sylvie Testud mais aussi l'humoriste Elie Semoun.
L'intégralité du témoignage de Sylvie Le Bihan est à retrouver dans Marie Claire en kiosques le 7 mars 2017.