Biographie
- Naissance : 17 juin 1936, Nuneaton
- Âge : 88 ans
- Signe astrologique : Gémeaux
- Résidence : Grande-Bretagne
Il détient le record de sélections au Festival de Cannes, avec 19 films sélectionnés, dont 14 en compétition. Il est le visage d'un cinéma engagé, social, mais qui fait des entrées. Ken Loach, quatre prix du jury à Cannes, plus deux Palmes d'Or et deux Césars, c'est le cinéma adulte, sensible, et humain.
Kenneth Charles Loach naît à Nuneaton, en Angleterre, le 17 juin 1936. Son père est ouvrier électricien d'usine et son milieu familial plutôt conservateur. Après des études de droit à Oxford, il commence dans le spectacle comme acteur de répertoire, puis au début des années 60 il entre à la télévision pour réaliser, en 1964, trois épisodes de la série Z Cars, une des bornes de la BBC, diffusée tout au long de 799 épisodes entre 1962 et 1978. Ensuite, il se spécialise dans la réalisation de docu-dramas, des téléfilms sur des thèmes sociaux, filmés comme des documentaires, où les héros affrontent le chômage, les structures familiales et sociétales qui les encerclent. La série se nomme Wednesday Play (la pièce du mercredi) et s'intéresse à divers sujets sociétaux, comme l'avortement, les maladies mentales et diverses luttes des membres des classes populaires contre l'administration. Ken Loach trouve là ce qui va devenir son style, de la fiction filmée comme du documentaire, avec le plus souvent des acteurs non professionnels et des dialogues suggérés plutôt qu'appris. Il a l'habitude de donner les dialogues à ses acteurs au dernier moment. Voire de les laisser sans scénario, en leur expliquant simplement la situation.
Vers la fin des années 60, il passe au grand écran et tourne son premier film de cinéma, Pas de larmes pour Joy, avec Terence Stamp. Une histoire de déchéance sociale pour une jeune femme en banlieue de Londres. Son deuxième film, Kes, en 1969, va marquer durablement l'inconscient britannique. C'est l'histoire d'un enfant dans une ville minière, malmené par son entourage, qui reporte son attention sur le dressage d'un faucon crécerelle qu'il a trouvé. Le film est encensé par la critique et considéré comme l'un des dix meilleurs films de l'histoire du cinéma britannique. Il poursuit sa quête de sens avec des films, parfois expérimentaux, qui touchent toujours à des problèmes de société et de la classe ouvrière, comme Family Life (1971), qui traite de la schizophrénie, Regards et sourires (1981), qui se situe dans le milieu de la sidérurgie frappé par les fermetures d'usines, Fatherland (1986), qui narre le passage à l'ouest d'un chanteur subversif de Berlin Est qui doit affronter le capitalisme après le communisme, Rif-Raf (1990) sur des déclassés sortis de prison qui tentent de s'insérer...
En parallèle, il accepte une commande de la télévision pour réaliser un documentaire en plusieurs épisodes sur une grève de mineurs, Question of leadership, dont la teneur sera jugée trop orientée pour être diffusée par la chaîne qui l'a commandé.
Dans les années 90, Ken Loach est un réalisateur sans pareil, qui réussit à remplir les salles avec des films engagés, sans vedettes, sur des sujets épineux et des thèmes historiques et le plus souvent sociaux. Secret Defense (1990) déclenche des polémiques avec sa vision du problème de l'Irlande du Nord. Raining Stones (1993) observe la précarité dans les années Thatcher. Ces deux films valent successivement à Ken Loach le Prix du Jury au Festival de Cannes. Ladybird (1994), tiré d'une histoire vraie, dépeint la cruauté des services sociaux qui retirent leurs enfants aux femmes en péril social. Land and Freedom (1995) se déroule pendant la guerre d'Espagne, en 1936. Carla's Song (1996) se passe au Nicaragua. My Name is Joe (1998) mélange drame, alcoolisme, chômage, à Glasgow, et rapporte un Prix d'interprétation masculine à son acteur principal à Cannes.
Dans les années 2000, Ken Loach est quasi une institution, une sorte de dernier survivant, combatif et respecté, d'un cinéma militant, politique, mais débarrassé des pesanteurs didactiques au profit d'une humanité profonde et d'une émotion réelle. Bread and Roses (2000) montre les conditions de travail des immigrés aux USA. The Navigators (2001) critique la privatisation des chemins de fer en Angleterre. Sweet Sixteen (2002) évoque le deal de drogue comme solution à la pauvreté. Just A Kiss (2004) décrit les rapports amoureux inter-ethniques. En 2006, il remporte sa première Palme d'Or à Cannes avec Le Vent se lève, qui traite des origines de la guerre civile irlandaise, et déclenche les foudres de certains commentateurs britanniques. It's A Free World (2008) se penche sur le sort des travailleurs sans-papiers.
Ken Loach, qui est définitivement anglais, est un amateur éclairé de football, supporter du club de Bath, où il réside avec sa femme Lesley, et même actionnaire du club local. Il était donc naturel qu'il insuffle à son cinéma un peu de cette passion, à travers Looking For Eric (2009), qui suit les aventures d'un postier dépressif qui va se reprendre en main avec l'aide de son idole Eric Cantona. Le footballeur français, devenu comédien, coproduit le film et y joue son propre rôle. Toujours à l'avant-garde d'un militantisme assumé et de la notion de partage, Ken Loach décide en 2010 de mettre ses anciens films en accès libre sur la plateforme Youtube, en Angleterre et dans certains pays. Route Irish, en 2010, fusionne scènes documentaires et fiction dans un film qui s'intéresse à la guerre d'Irak et ses effets en Angleterre. La Part des anges (2012) offre à Loach un nouveau Prix du Jury à Cannes, pour une comédie, ce qui est plutôt rare chez lui, sur le chômage des jeunes et la culture du whisky. Après un documentaire, L'esprit de 45 (2013), sur une victoire locale du Parti Travailliste, il revient à la fiction avec Jimmy's Hall (2014), un nouveau sujet historique, dans l'Irlande des années 20, qui déclenche l'ire des conservateurs et des autorités catholiques.
Ils ne sont pas nombreux, les réalisateurs doublement palmés d'or au Festival de Cannes : ils sont neuf, depuis que Ken Loach a rejoint ce cercle ultra-fermé, en 2016, avec la récompense allouée à son Moi, Daniel Blake, qui narre le parcours d'un menuisier en butte aux complexités de l'administration après un congé de maladie. Une fois encore, Loach mélange discours social et profonde humanité, pour traiter avec le plus de proximité possible des problèmes quotidiens et particulièrement ceux qui touchent les classes populaires et ouvrières. En 2019, Sorry we missed you creuse le même sillon naturaliste qui a fait sa réputation. A 80 ans passés, Ken Loach, c'est certain, tournera jusqu'à la fin de ses possibilités des films avec un discours. La relève est là : son fils Jim Loach est également réalisateur de documentaires et de fictions. Sa fille Emma Loach également. Ken Loach a un autre fils et une autre fille, et a perdu un dernier fils dans un accident d'auto à l'âge de 5 ans.