Depuis 2013 et sa prouesse insensée en Espagne, lorsqu'il avait traversé une cavité à flanc de montagne à la vitesse de 250 km/h à la Roca Foradada (dans le Montserrat), Alexander Polli était l'une des figures les plus réputées du vol en wingsuit : l'Italien d'origine norvégienne de 31 ans s'est tué lundi 22 août 2016 à Chamonix, où il vivait, en s'adonnant à sa passion risquée, qui paye régulièrement un lourd tribut...
Selon Le Dauphiné Libéré, Alexander Polli a trouvé la mort en fin de matinée alors qu'il évoluait à environ 1 500 mètres d'altitude du côté du col du Brévent, dans le massif du mont Blanc. Le quotidien régional indique que le sportif de l'extrême "s'est crashé au niveau du couloir de l'Ensa", percutant un arbre alors qu'il effectuait vraisemblablement une vrille, selon les premiers éléments de l'enquête rapportés. "Conscient à l'arrivée des secouristes, à 11h08", alertés par le groupe qui l'accompagnait, mais touché à la tête et "souffrant certainement d'hémorragies internes sévères", il n'a pas survécu à ses blessures.
Star du wingsuit et du BASE jump (saut depuis des objets fixes, discipline qui accuse chaque année plusieurs morts), Alexander Polli était suivi par de nombreux adeptes captivés par les vidéos YouTube à sensation de ses vols.
Le jeune homme de 31 ans était le fondateur de Morals Arriverderci, précise encore Le Dauphiné Libéré, un collectif d'amoureux des sports extrêmes qui filmait ses exploits, avec pour credo "Ne voyez jamais de limites à vos capacités".
En novembre 2013, interviewé par le site DW qui notait qu'une vingtaine de ses collègues s'étaient déjà tués en pratiquant rien que cette année-là, Alexander Polli affirmait ne pas avoir le sentiment de risquer sa vie ni le vouloir, mettant en avant sa préparation et son entraînement. Mais il confessait aussi, en toute franchise : "J'ai extrêmement peur de mourir. Et j'ai peur du vide. Je ne me serais jamais embarqué dans ce type de sport si j'avais dû être le premier à le faire. Mais, en fait, il y avait déjà d'autres parachutistes, skydivers et base jumpers qui faisaient ça depuis vingt ans. Alors je me suis demandé pourquoi, s'ils le pouvaient, je n'en serais pas capable. Est-ce que c'est quelque chose que je ne peux vraiment pas faire, ou est-ce simplement la peur qui m'en empêche ?"
Au cours du même entretien, il exposait un tempérament posé, loin d'être un trompe-la-mort, une tête brûlée prête à sacrifier son existence sur l'autel de l'adrénaline. Il ne cherchait pas à battre des records, ni à passer toujours plus prêt des montagnes, simplement à profiter. "Aujourd'hui encore, quand je suis là-haut avec mon swingsuit, je me demande : 'Mais qu'est-ce que je fais ici ? Je suis dingue ou quoi ?' Et puis je me rends compte de ce que je suis sur le point de faire, et je réalise que je peux tout simplement savourer, grâce à tout cet entraînement", expliquait-il, racontant avoir l'impression de voir un rêve réalisé en regardant les vidéos de ses exploits une fois de retour sur la terre ferme.
Insistant sur l'expertise nécessaire – les connaissances en physique – à la pratique de ce sport, il imputait dans la même conversation la mort de certains de ses adeptes à un "manque de chance". Il n'en a pas eu plus.
"Vivre à dessein. Marcher jusqu'à la frontière. Écouter attentivement. S'entraîner au bien-être. Jouer en s'abandonnant. Rire. Choisir de vivre sans regrets" : sa présentation sur Twitter a des airs d'épitaphe...