Plus de deux ans après l'effroyable attentat qui a frappé les locaux de Charlie Hebdo, faisant douze morts dont huit membres de la rédaction, une plainte est sur le point d'être déposée contre le journal.
Selon les informations rapportées mardi 28 mars par Le Parisien, la veuve du journaliste et voyageur Michel Renaud, Gala Renaud, entend déposer plainte et se constituer partie civile contre Riss, le directeur de la publication de l'hebdomadaire satirique, pour "abus de confiance aggravé", au sujet des bénéfices générés par le fameux numéro des survivants ("Tout est pardonné") publié le 14 janvier 2015.
La plaignante, qui avait déjà déposé une première plainte en juin dernier auprès du procureur de Paris, "estime que la dizaine de millions d'euros générée par la vente du numéro post-attentat (...) n'a pas été reversée aux familles des victimes, contrairement, selon elle, aux engagements pris publiquement par des responsables du journal", lit-on. "Cette annonce, reprise par de nombreux médias, indiquait que les recettes du numéro des survivants seraient intégralement reversées aux familles des victimes", ont annoncé les avocats de Gala Renaud.
Selon eux, "le journal n'aurait pas tenu ses promesses, affectant cet argent à une autre cause : pérenniser le titre. Objectif qui devait selon eux être assuré par l'appel à la générosité publiquement qui rapportera plus de 4 millions d'euros", poursuivent nos confrères. "Ce revirement du journal démontre une intention délibérée de détourner les fonds promis initialement aux familles des victimes. Mme Renaud subit un préjudice, et les acheteurs du numéro des survivants aussi ont été trompés", estiment les représentants de Gala Renaud.
Pour rappel, le numéro des survivants s'était écoulé à près de 8 millions d'exemplaires – un record dans l'histoire de la presse française – et aurait rapporté près de 15 millions d'euros à Charlie Hebdo. Toujours selon Le Parisien, Gala Renaud n'aurait toutefois perçu de la part du journal satirique que 141 000 euros de dons pour elle et pour sa fille. Dans sa plaine, elle s'appuie sur un ouvrage publié au mois de janvier par Marie Bordet et Laurent Telo, Charlie Hebdo, le jour d'après, qui rapporte les tensions et les désaccords au sein même de la rédaction sur l'utilisation de l'argent récolté après les attentats. Selon les auteurs, il y aurait eu un "revirement" au sein d'une rédaction "dévastée et devenue riche à millions" qui a "implosé de l'intérieur".
Contacté par Le Parisien, Riss a contre-attaqué en affirmant que la plainte de Gala Renaud était "vouée à l'échec" et que l'action judiciaire engagée à son encontre était "absurde". Dans sa défense, le directeur de la publication a par ailleurs affirmé qu'à aucun moment les responsables n'avaient promis de reverser les recettes de ce numéro aux familles des victimes. "Dans le chaos du mois de janvier, tout le monde s'exprimait. Mais les responsables officiels de Charlie n'ont jamais dit publiquement que les recettes du numéro spécial iraient aux victimes. À l'époque, on n'avait du reste pas la moindre idée de ce que ça pouvait rapporter", a-t-il expliqué, ajoutant que les 4,2 millions d'euros provenant de dons avaient été reversés aux familles des victimes.