Soutien régulier de la vie culturelle sur le Rocher, où on a pu la voir ces derniers mois s'intéresser aux expositions en cours au Nouveau Musée National de Monaco, la princesse Caroline de Hanovre était cette semaine à Paris pour assister à la naissance d'un nouvel immortel : Dany Laferrière.
L'écrivain haïtien et québécois de 62 ans, élu en décembre 2013 au fauteuil d'Hector Bianciotti (2e fauteuil) à l'Académie française, doit être reçu en séance solennelle sous la Coupole ce jeudi 28 mai 2015 à 15h par Amin Maalouf. Mais au préalable, l'auteur de Vers le Sud (adapté au cinéma par Laurent Cantet) et L'Énigme du retour (prix Médicis 2009) s'est vu remettre l'attribut qui lui était dû : l'épée, apanage des académiciens.
C'est au cours d'une cérémonie organisée mardi 26 mai à l'Hôtel de Ville de Paris et conduite par l'inénarrable Jean d'Ormesson, plus ancien élu de l'Académie française, que ce moment solennel a eu lieu, en présence de 400 personnes, dont la maire Anne Hidalgo et l'auteur et ancien ministre de l'Éducation nationale Xavier Darcos, mais aussi l'élégante Charlotte Rampling, qui jouait dans Vers le Sud. Sous le regard visiblement charmé de la princesse Caroline, présidente du conseil d'administration et du conseil littéraire de la Fondation Prince-Pierre-de-Monaco, et d'une Hélène Carrère d'Encausse (élue en 1990 à l'Académie, dont elle est le secrétaire perpétuel depuis 1999) resplendissante en rose du haut de ses 85 printemps, Jean d'Ormesson, 89 ans, a pu laisser libre cours aux sentiments intenses qu'il éprouve pour Dany Laferrière, avec qui il ne déjeunait pour la première fois que quinze jours plus tôt.
Comme le rapporte plaisamment Le Figaro, qui assistait à la cérémonie de remise de l'épée organisée par le comité de l'épée avant l'intronisation officielle jeudi, l'auteur de La Gloire de l'Empire et occupant du fauteuil 12, dont on découvrait récemment d'étonnantes confidences amoureuses dans Gala, est épris depuis longtemps de la prose de son nouveau collègue sous la Coupole, mais aussi, depuis plus récemment, de lui, premier immortel haïtien/canadien, qu'il n'avait guère eu l'opportunité de connaître vraiment. Et là... "Je te tutoie et pourtant je tutoie très peu de monde. Nous nous sommes vus seulement deux ou trois fois. Comment cela s'est-il passé ? J'ai eu pour toi une espèce de coup de foudre. On s'est envoyé des lettres. Les miennes étaient stupides. Les tiennes étaient irrésistibles", a confié Jean d'Ormesson dans son discours. Un discours fait "sans notes qui a enchanté et fait sourire l'assistance, où il était souvent question d'affection, de tendresse, de gaîté et de joie", avant de remettre à ce "Québécois de Haïti, une espèce de rêve de francophonie et de diversité", l'épée fabriquée et personnalisée en Haïti par le sculpteur Patrick Vilaire. En plus de représenter la divinité vaudou locale Legba, une bulle d'encre symbolique y a été ajoutée.
Évoquant à son tour les femmes de sa vie, pour qui Jean d'Ormesson avait précédemment eu une émouvante pensée, et observant que "leurs vies méritaient d'être contées", Dany Laferrière a ensuite pour compléter le rêve de francophonie de son nouvel ami : "Je suis né en Haïti, mais je suis devenu écrivain au Québec. Je suis un être en trois morceaux répartis entre Haïti, Montréal et Miami", a-t-il déclaré, non sans prendre soin, comme l'ont judicieusement relevé nos confères de Metronews, de souligner que "Montréal n'est pas une succursale littéraire de Paris, mais un réel lieu d'invention".