Trois des membres de Téléphone se sont retrouvés sous un nouveau nom, Les Insus, à la rentrée. Richard Kolinka, Jean-Louis Aubert et Louis Bertignac ont donné trois concerts à Paris, Lille et Lyon, qui ont affiché complet en quelques minutes. La nostalgie de Téléphone, plein pot ! Cette "reformation" s'est faite sans la bassiste Corine Marienneau, qui est tout simplement tombée de son tabouret en apprenant que les garçons se retrouvaient. Alors qu'une nouvelle intégrale du groupe sort ce vendredi, un projet dans lequel elle s'est beaucoup investie, Corine se confie au Parisien. On y lit tout l'amour qu'elle porte à Téléphone et sa déception d'aujourd'hui.
Au moment de cette "reformation", la bassiste a été très claire : ne réécrivons pas l'histoire. Téléphone restera toujours un quatuor ; sans l'accord de Corine, impossible d'utiliser le nom du groupe. "C'est une manière subliminale de récupérer la marque et de m'effacer", disait-elle dans L'Obs à propos des concerts de Richard, Louis et Jean-Louis. Dans Le Parisien, elle raconte qu'après avoir travaillé tout l'été sur l'intégrale du groupe, tenant à ce que chaque morceau soit remastérisé parfaitement (avec l'aide d'Alex Gopher), que chaque inédit et archive vaille le coup, la surprise des retrouvailles de ses anciens camarades fut un coup de poignard : "Cela m'a violemment surprise." Et de préciser : "Ce n'est pas moi qui ait refusé de jouer avec eux. Moi, je ne demandais que cela. Depuis vingt ans, je leur propose de faire une tournée d'adieux, pour boucler la boucle. Je n'ai pas de réponse. Nous sommes partis sans dire au revoir à notre public. Cette intégrale, c'est une manière de clore notre histoire." Le trait est tiré.
Depuis la séparation de Téléphone en 1986, plusieurs tentatives de réunir les quatre musiciens ont échoué. Notamment en 1999, alors qu'ils avaient même débuté les répétitions. Mais l'histoire du groupe est intiment liée à des histoires d'amour, "une folie", a estimé Corine dans L'Obs, ajoutant : "Je passais pour une femme courageuse, libérée, révolutionnaire, une sorte d'aventurière (...) En réalité, j'étais un objet. J'étais là par amour." Alors que ses rapports avec Jean-Louis Aubert sont déjà catastrophiques, Corine publie en 2006 son autobiographie, Le Fil du temps. Dans Rolling Stone, dont Téléphone fait la couverture, on ressort cette vieille interview de Louis Bertignac datant de 2012 et accordée à Mojo : "Jean-Louis ne veut pas de Corine. Ça commence comme ça. Et ça finit comme ça. Elle a écrit son bouquin. Moi, j'ai lâché à la soixantième page, quand elle raconte que je suis aux chiottes avec une grosse. Qu'est-ce ça venait foutre là ? Richard et Jean-Louis apparemment, eux, l'ont lu en entier et du coup, Richard s'est mis sur la même longueur d'onde que Jean-Louis."
Une tentative de coup de grâce a eu lieu il y a "trois ou quatre ans". "Ils ont à nouveau voulu reformer le groupe en me proposant l'aumône pour que je reste chez moi et que je me taise", racontait Corine dans L'Obs. Un deal également refusé par Louis Bertignac à l'époque. Malgré tout, la bassiste garde de grands souvenirs de leur âge d'or à quatre. Elle s'y est replongée pour travailler sur cette intégrale : "C'est la première fois que je réécoutais tous nos albums. Et j'ai pris mon pied. Cela peut sembler prétentieux, mais c'était un sacré groupe de rock. Puissant, parfois très beau, raconte-t-elle aujourd'hui dans Le Parisien. Quand on jouait ensemble, on était surhumains. Le reste du temps, on était de pauvres petits humains avec nos petits problèmes. Ce gâchis me chagrine."
Depuis la fin de l'aventure, Corine Marienneau a sorti un album solo avec la complicité de Louis Bertignac. Mère de famille, âgée de 63 ans, elle s'investit désormais dans les collèges et les foyers de la Ddass.