On pourrait croire que Julie Andrieu, figure appréciée de la gastronomie dans le PAF, n'est qu'une fille sprirituelle et une disciple parmi d'autres de Jean-Pierre Coffe, mort cette semaine à 78 ans ; mais le lien va plus loin : dans sa plus tendre enfance, la sympathique présentatrice et critique de 42 ans fut presque comme sa fille adoptive ; sa protégée, tout au moins... Bouleversée par le décès du Cyrano du bien-manger, savoureusement excessif et rhéteur hors pair comme lui, elle rend hommage à son "panache" dans un message très émouvant publié mercredi sur sa page Facebook.
"Il nous avait hébergées un peu plus d'un an en 1975 dans sa maison, ça ne laisse pas indemne !", rappelle Julie Andrieu au coeur de son témoignage, avec une nostalgie et une tendresse qui défient le temps. Née en février 1974, elle n'avait en effet qu'un an quand Jean-Pierre Coffe les accueillies, avec sa mère l'actrice Nicole Courcel, que le père de Julie avait abandonné pendant sa grossesse. "Maman a beaucoup ri et fait la fête avec lui, leurs histoires de folles nuits avec Poiret et Serrault ont bercé les miennes", raconte-t-elle comme si elle se souvenait de tout, éclairant le savoir-vivre et le goût de la bonne chère de Jean-Pierre Coffe d'une lumière intime et privée.
Confrontée à l'adolescence à des troubles alimentaires, celle qui est devenue depuis une télégénique partageuse de recettes et l'auteure de livres de cuisine publiés aux éditions Alain Ducasse, mais aussi la maman de deux enfants, est certaine que sa vocation n'est pas étrangère à l'influence de ce personnage si attachant : "Quand on me demande de qui je tiens cet amour de la table, je ne peux m'empêcher de penser que les purées de légumes du potager de Jean-Pierre n'y sont pas pour rien, écrit-elle, rappelant l'attachement du regretté Coffe aux choses vraies et, en particulier, à la nature. Au-delà de l'évangélisation gastronomique de tout un pays, je crois qu'il était fier d'avoir composé l'un des plus beaux jardins de France, dont il avait planté chaque arbre, connaissait chaque fleur. Les tulipes profitaient de sa conversation et les bouleaux de ses caresses " on dirait de la peau de bite " (ça ne s'invente pas)." C'est d'ailleurs dans le jardin de sa maison du lieu-dit La Forêt, sur la petite commune eurélienne de Lanneray, où il a vécu plus de quarante ans et s'est éteint à 78 ans le 29 mars 2016, qu'il souhaitait que ses cendres soient dispersées...
"A la douleur, à la solitude, à la grisaille de l'esprit il a toujours répondu par des coups d'éclat, des coups de vie et une impertinence terriblement spirituelle. Nous mangerons un morceau de pâté et boirons un coup à ta santé, mon Jean-Pierre. A ton panache...", conclut-elle à la gloire du "plus tendre des amphitryons" et des "trois maîtresses les plus fidèles" qui ont accompagné sa vie, "fantaisie, audace et convivialité". Il a quitté la scène, déplore-t-elle, et l'on se prend à penser à la sortie du héros d'Edmond Rostand : " Que je pactise ? Jamais, jamais ! (...) Il y a (...) quelque chose que sans un pli, sans une tache, j'emporte malgré vous, et c'est... (...) Mon panache."
GJ