La liesse est à la hauteur du suspense qu'ils nous ont offert depuis Malmö, en se laissant entraîner dans des prolongations périlleuses par le Danemark, qui jouait sous le regard de ses têtes couronnées : de retour en France après une nuit qu'on imagine aisément intense, les Experts, qui ont décroché pour la hand français masculin le quatrième sacre mondial de son histoire (un triomphe dont nous vous avons offert de belles images), ont été accueillis en héros. Un statut franchement pas usurpé au vu du jeu produit pendant la compétition, et au vu de leurs nerfs d'acier dans cette finale au couteau, gravée dans les annales.
Ils étaient "seulement" quelques dizaines, a-t-on envie d'écrire, deux cents à trois cents personnes, à guetter leur arrivée à Roissy, qui avait été largement annoncé par les médias, dans l'euphorie générale. Mais peu importe le nombre, seule la ferveur compte, et l'histoire retiendra que ces garçons-là sont entrés dans la légende des sports collectifs en réalisant quelque chose d'immense, en conservant leur titre de champions du monde après avoir réalisé un véritable grand chelem - JO 2008, Mondial 2009, Euro 2010, auquel on ajoute donc avec le dernier enthousiasme ce Mondial 2011 emporté de haute lutte.
Au terminal de Roissy, Claude Onesta, le tacticien albigeois des Bleus depuis dix ans, sourit enfin d'une joie décomplexée. La veille, les reporters de L'Equipe l'avaient trouvé dans un état d'épuisement, physique et nerveux, qui l'empêchait même de sourire et de réussir à savourer cette nouvelle consécration, comme il l'a expliqué depuis, rappelant notamment les blessés qui ont contrarié la campagne française : "Mais c'est parce que j'étais vraiment très fatigué. Vous savez, je ne suis presque pas allé dans le vestiaire à la fin de la rencontre. Toute l'excitation qu'il y avait dedans me pesait. Je suis resté seul dans le bus pendant trois quarts d'heure. J'avais quatre-vingt-deux SMS sur mon téléphone. J'ai pris le temps de les lire. Non, vraiment, j'avais besoin de souffler. De la tension nerveuse, il y en a eu. La compétition a été longue et compliquée. Au quotidien, ça a été plus exigeant que les années précédentes (...) Dimanche il y a eu la dramatique du match. Il a fallu aller l'arracher, cette victoire. On a le sentiment d'être allé la chercher plus loin et d'avoir plus bossé qu'avant."
Et de souligner, avec cette acuité et cette santé d'esprit qu'on lui connaît et qui l'honore : "Il y a toujours une nouvelle histoire. Je vis mal que les gens parlent de "l'équipe de France". Ce n'est jamais la même équipe. J'avais des joueurs qui n'avaient rien gagné. Cette année, c'était une nouvelle aventure, une nouvelle équipe et une nouvelle répartition des responsabilités. Et comme ça a été compliqué avec la préparation très courte et les blessés, ce titre-là me fait donc plaisir."
Rayonnant, Onesta a pu à loisir savourer les délires de Karaboué et Dinart, deux des doyens de ce groupe, mais deux grands gamins qui nous régalent toujours tant par leurs exploits que par leurs coups d'humour, de Jérôme Fernandez, capitaine courage qui empoche un troisième titre mondial (comme Dinart et Omeyer), du prodige Nikola Karabatic, le meilleur joueur de la planète et le champion de l'autographe, ou encore de l'attachant Titi Omeyer, le meilleur gardien de tous les temps, qui, un peu en-deçà (contrairement à son homologue du soir, le Danois Landin, un vrai poison), a vécu une finale difficile au dénouement, heureusement, magique. Et c'est d'ailleurs le dernier arrêt du match de Titi que Claude Onesta retient en particulier, expliquant avec émotion à L'Equipe : "On a tellement souffert avec lui. On s'est tellement investi pour qu'il reprenne le fil du match. A la fin, il nous a dit toute l'émotion qu'il avait ressenti. "Vous auriez pu m'en vouloir", a-t-il précisé. Mais il a senti que tout le monde comptait sur lui. On lui a dit : "On sait ce qu'on te doit". Et ça a été une délivrance pour nous. Cela montre l'émotion et la profondeur de l'état d'esprit de ce groupe."
Après l'aéroport, on saute dans les costards et direction le palais de l'Elysée, où Nicolas Sarkozy les attendait pour 14h30, mettant un point d'honneur à les féliciter en personne. Un grand moment pour tous, et peut-être plus encore pour les jeunes pousses, comme le formidable Xavier Barachet, le jeune arrière de Chambéry, épatant durant la compétition et la finale du haut de ses 22 ans.Non loin du palais présidentiel, les joueurs arrivaient ensuite en bus sur les Champs-Elysées pour une séance de dédicaces au store Adidas que l'animateur Jean-Luc Reichmann, fervent supporter (il était à fond avec les handballeurs lors des JO de 2008) s'il en est, n'a pas manqué, entièrement dédié à leur cause. Une journée de triomphe à revivre en images ci-dessus !