
Comme l'an dernier, c'est dans un contexte très particulier et proche de la crise, que le CNC lançait mercredi 8 janvier les Assises de la diversité du cinéma. 5% de fréquentation dans les salles de cinéma en France, seulement 10% des films français rentables et un rapport René Bonnell incendiaire faisant écho aux propos tenus par Vincent Maraval il y a un an de cela... Le cinéma français ne va guère mieux. La ministre de la culture, Aurélie Filippetti en est certaine : "Nous sommes au seuil d'une nouvelle mue."
En marge de l'événement où René Bonnell a épinglé les coûts de production et les salaires des acteurs en levant le voile sur une cinquantaine de propositions pour encadrer l'industrie en péril, BFM Business a dévoilé sa propre étude, très alarmante. Selon eux, seuls 10% des films français seraient rentables, et aucun des 20 plus gros budgets de l'année n'atteindrait le seuil de rentabilité. Ce qui n'a pas empêché La Vie d'Adèle de se hisser à la première place. Au pied du million d'entrées, la Palme d'or d'Abdellatif Kechiche a déjà rentabilisé son investissement de 4 millions d'euros, un score qui sera amélioré avec les César, les ventes à l'international, et le secteur de la vidéo et de la télévision. La comédie française de l'année au box-office, Les Profs, prend la seconde place avec 196% de rentabilité contre 219 pour Adèle. 9 mois ferme figure sur la troisième marche du podium avec 2 millions d'entrées pour 7 millions d'euros de budget et 164% de rentabilité assurée. À l'inverse, le film le moins rentable de l'année, l'obscure et anecdotique Le Premier Homme (avec Jacques Gamblin) réalise seulement 2% de rentabilité, à savoir qu'en gros, 2 euros pour 100 investis.
Pour le CNC, les chiffres sont un peu moins sombres, mais l'idée reste la même : moins d'un tiers des films sont rentables, une conjoncture qui dure depuis 2004 avec des pics plus ou moins forts. Cette année, aucun film français n'a franchi la barre des 5 millions d'entrées, et aucun film de plus de 10 millions d'euros de budget n'entre dans ses frais. En cause pour le rapport Bonnell, les salaires des acteurs et l'inflation des cachets. Le manque de transparence sur le sujet, déjà avancé par Maraval un an plus tôt, est pointé du doigt : "D'un côté, une partie de la production se paupérise, de l'autre, on assiste à une dérive des coûts, mais seulement pour un petit nombre de films." Suffisant pour permettre à des acteurs comme Dany Boon de se positionner comme le meilleur salaire de l'année, malgré deux derniers échecs cuisants. Pour Aurélie Filippetti, c'est inacceptable : "S'il le faut, nous prendrons des mesures pour limiter l'inflation des coûts", tonne la ministre, bien consciente que le système de financement français diffère de celui prôné à Hollywood, ce que le marginal Abdellatif Kechiche avait déjà pointé du doigt.
L'avenir du cinéma français pourrait également se trouver dans la VOD, et la place faite au numérique, chantier prioritaire pour Aurélie Filippetti. Pendant ce temps-là à Las Vegas, Fleur Pellerin (ministre déléguée à l'Économie numérique) a rencontré au CES 2014 le PDG du puissant et florissant Netflix (une entreprise proposant des séries et films en flux continu sur Internet), Reed Hastings. La ministre devait lui exposer les avantages à s'implanter en France, à participer à l'écosystème de notre industrie et à soutenir la création française.