Peu après la naissance de la polémique, Michel Hazanavicius, réalisateur oscarisé et césarisé de The Artist, s'était lancé dans le sujet. Dans les colonnes du Journal du dimanche en janvier, il avait ainsi déclaré que le débat autour du financement du cinéma français est "sain", et qu'il faut "sans doute créer un choc pour que l'on s'y intéresse". Il regrettait cependant la manière employée par Vincent Maraval. "Plus que de stigmatiser un corps de métier, les acteurs, et parmi eux une dizaine d'individus, il faut réfléchir à l'inflation du budget des films," estime-t-il. Plusieurs mois de réflexion plus tard, l'influent Hazanavicius revient à la charge avec une tribune publiée dans Le Monde du 5 mai, qui critique le système de financement du cinéma français, un peu plus d'une semaine avant l'ouverture du Festival de Cannes.
Selon Michel Hazanavicius, le cinéma a fait certes de bons résultats (204 millions d'entrées en 2012), mais ce chiffre cache le fait qu'un trop grand nombre de longs métrages échouent dans les salles et les budgets continuent d'augmenter fortement. Il estime également que les acteurs et leurs salaires mirobolants ne doivent pas être les seuls sur le banc des accusés : "Le fait que les gens qui fabriquent des films - réalisateurs auteurs, acteurs techniciens, et producteurs dans certains cas - soient plus intéressés financièrement au succès des films [...] Tous préfèrent gagner de l'argent en amont de la sortie puisque l'espoir d'en gagner dans la phase d'exploitation est quasi nul."
Un constat que le metteur en scène, compagnon de Bérénice Bejo, accompagne de pistes de solution, tel l'intéressement sur les entrées, c'est-à-dire que tous ceux qui participent à la réalisation d'un film bénéficient de son succès : "Nous aurons d'autant plus intérêt à en faire de bons, et pour moins cher s'ils peuvent rapporter de l'argent." Il s'attarde aussi sur le problème complexe du rôle des chaînes de télévision dans le financement des films, accusées de fournir de l'argent pour des longs métrages lisses et sans saveur destinés à être diffusés chez elles, et de s'investir de moins en moins, réalisant que cinéma et audience font de moins en moins recette à la télévision, à l'heure de la VOD et du téléchargement. Michel Hazanavicius propose une idée intéressante, celle d'élargir le financement aux fournisseurs d'accès à Internet : "Il faut accepter de se dire qu'Internet, c'est de la télévision, et que la télévision c'est de l'Internet, et tirer les conséquences de ces nouvelles définitions, notamment pour le financement."
Reste à ce que la Commission européenne aille dans ce sens... Michel Hazanavicius aborde en effet le rôle de l'Europe puis la mission Lescure, dont les acteurs du cinéma "attendent" selon lui "beaucoup" : "Ce rapport n'aura aucun sens si ses conclusions ne sont pas portées avec le plus grand courage et la plus grande conviction face à une Europe sceptique de son cinéma et indifférente à sa culture."