Une fois encore, l'enquête est signée Médiapart. Et ça fait mal. La députée LREM, Laetitia Avia, est accusée par pas moins de cinq anciens assistants parlementaires "d'humiliations à répétition au travail" ainsi que d'avoir tenu "des propos à connotation sexiste, homophobe et raciste." La députée de 34 ans, élue de la 8e circonscription de Paris dément et veut attaquer.
Le timing aurait été choisi avec soin selon la députée Laetitia Avia à qui il fait très mal : ce mercredi 13 mai 2020, elle présente à l'Assemblée nationale une proposition de loi sur la lutte contre la haine sur internet. L'enquête de Médiapart affirme que l'élue de La République en marche aurait pourtant bien besoin de revoir elle-même son comportement... Cinq anciens collaborateurs ont dénoncé des "humiliations à répétition", pointant du doigt son supposé racisme - elle aurait multiplié les blagues de mauvais goût sur un assistant asiatique -, son homophobie ("on a voté l'amendement des PD", a-t-elle écrit dans un message), ainsi que du sexisme ("Elle insulte souvent les députées qu'elle n'aime pas de pute", a affirmé un ancien collaborateur).
Laetitia Avia, qui s'était déjà tristement illustrée par une affaire dans laquelle elle était accusée d'avoir mordu un chauffeur de taxi, est aussi pointée du doigt pour avoir abusé de ses assistants en les faisant travailler sans relâche. "Travailler pour elle, c'était être sollicitée de 7h à 1h du matin. Même le week-end", a assuré une ex-assistante. Parmi ses demandes qui dépassaient le cadre du travail d'un assistant parlementaire, il y avait notamment la gestion de rendez-vous personnels ou la réservation de place pour son mari pour Roland-Garros... Par-dessus le marché, la députée n'aurait pas toujours respecté le droit du travail puisqu'elle aurait officiellement embauché une assistante un mois après sa vraie prise de poste et certains congés payés d'une autre assistante n'auraient pas été payés... Des faits rapportés au président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, et à la cellule anti-harcèlement de la chambre.
Laetitia Avia a tenté de maîtriser la polémique en s'emparant de son compte Twitter. D'entrée de jeu, elle a opté pour la carte de la victime. "En deux mois, David Perrotin [le journaliste ayant mené l'enquête, NDLR] a publié trois articles sur moi. Un acharnement qui conduit à publier des accusations mensongères et incohérentes à la veille du vote final de la #PPLCyberhaine. Ce n'est pas un hasard", a-t-elle écrit. Puis, dans un thread, elle a essayé de justifier certains faits. "Des bouts de messages privés ont été tronqués, détournés et décontextualisés. C'est de la manipulation honteuse, animée par un seul objectif : me nuire et porter atteinte à mon combat politique", a-t-elle réagi.
Et la députée de justifier une supposée homophobie : "L'amendement des PD ? C'est l'expression qu'utilisait mon ex-collab, lui-même homosexuel, pour désigner cet amendement que j'ai soutenu. J'ai repris ses mots dans un message sans imaginer qu'il puisse être détourné. Ce détournement heurte, j'en suis consciente et désolée." Furieuse, Laetitia Avia ne compte pas en rester là. "Je vais donc déposer plainte pour diffamation. Et nous nous en expliquerons devant le juge", a-t-elle assuré.
Cette affaire vient ternir un peu plus encore l'image du parti présidentiel. Alors que le Premier ministre Édouard Philippe avait présenté un plan de déconfinement à l'Assemblée, la députée LREM Martine Wonner a été exclue du groupe après avoir voté contre. Un signal qui laisserait entendre qu'il est impossible d'avoir un autre point de vue que la ligne du parti. D'ailleurs, selon Les Échos et Le Monde, un groupe dissident pourrait prochainement se former à l'Assemblée avec des élus LREM fusionnant avec des adversaires pour former un groupe d'urgence écologique... De quoi menacer la majorité présidentielle ?
Des épines dans le pied du parti lancé avec succès par le président de la République Emmanuel Macron, qui a déjà connu des revers ces derniers mois. Le fait le plus marquant étant bien évidemment le retrait de Benjamin Griveaux à la course pour la mairie de Paris à cause d'une affaire à caractère sexuel. Dans la foulée, sa remplaçante Agnès Buzyn a essuyé un échec au premier tour en n'arrivant qu'en troisième position derrière Rachida Dati et Anne Hidalgo, qui a fait un hold up sur l'élection avec 29,3% des voix. Le parti arrivera-t-il à renverser la vapeur lors du second tour ?