L'an dernier, Jeannie Longo, icône de la performance et de la persévérance à la française, nous émouvait avec un ouvrage autobiographique, Jeannie par Longo, qui semblait n'éluder aucun des sacrifices - notamment celui de ne jamais avoir été mère, avec son époux Patrice Ciprelli - qu'ont imposés sa carrière, entamée il y a plus de trente ans.
Et cette incroyable battante quinqua d'asséner, nouveau témoignage de son opiniâtreté : "lorsqu'on ne sert plus à rien, on n'existe plus."
A 52 ans, pourtant, et quand on a tout gagné, la détermination n'est pas une vertu acquise. Dans les colonnes du Parisien de ce mercredi 5 janvier 2011, Jeannie Longo fait le point, réagissant sur l'honneur qui vient de lui être accordé - elle a été élevée au rang de commandeur dans l'ordre de la Légion d'honneur dans la Promotion du Nouvel An -, mais analysant surtout sa panne d'envie : "De toute façon, je suis en train d'arrêter depuis quelques années."
L'entretien démarre sur des bases joviales, lorsqu'elle raconte son "heureuse surprise de ce début d'année" : "J'avais une lettre de l'Elysée dans le courrier que je n'avais pas ouvert. Je l'ai appris par la télé. J'ai vu mon nom en télétexte, je croyais à une blague."
Puis, très vite, il est question de la suite de sa carrière, marquée par un palmarès sans pareil - quatre médailles olympiques dont une en or, vingt-six médailles aux championnats du monde dont treize titres : "On se demande si cette marque de reconnaissance n'est pas plutôt pour ma carrière !" Elle lâche cela en riant, sur le ton de la blague, mais, au fond, c'est sérieux : "C'est vrai que je suis un petit peu vide d'objectifs. Je suis un peu fatiguée psychologiquement. Je manque d'entrain en ce moment."
5e du championnat du monde du contre-la-montre en 2010, l'épreuve de 2011, sur un circuit danois qui s'annonce "plat comme une galette des rois", ne la fait pas fantasmer. Même la perspective des Jeux Olympiques de Londres en 2012 est matière à douter : "Je n'ai absolument pas ça dans la tête. Pour le moment, je me cherche une motivation pour éventuellement faire une saison 2011. La saison ne débute plus que dans quelques mois. Mais, à mon âge, quelques mois, c'est déjà beaucoup !" Mais elle précise que si elle devait aller au Jeux, ce ne serait pas pour "établir un record de longévité" : "J'ai toujours voulu honorer le maillot bleu-blanc-rouge. C'est peut-être aussi pour ça qu'on m'a élevé au rang de commandeur." Mais rien n'est impossible : si l'hiver est "difficile", "ça reviendra peut-être avec le printemps", remarque-t-elle.
La question de la retraite se pose inévitablement, et la championne, grande adepte du piano, entre autres, semble commencer à se faire une raison : "J'arrive à voir d'autres horizons. Ce qui me paraissait inconcevable, comme ne pas m'entraîner un jour, je l'accepte beaucoup mieux."