"Elle a dit oui", comme l'anticipait la chanson créée sur mesure pour elle par Jean-Michel Jarre, qui doit ce soir envahir avec tout son gigantisme audiovisuel le port Hercule : Melle Charlene Wittstock, 33 ans, a épousé le prince souverain Albert II de Monaco, 53 ans. 55 ans après Grace Kelly, la Salle du Trône a vu la naissance d'une nouvelle princesse sur le Rocher : Son Altesse Sérénissime la princesse Charlene de Monaco, qui hérite également, outre du patronyme Grimaldi, des nombreux titres de noblesse monégasques dévolus au prince souverain mais tombés en désuétude depuis le décès de Louis II - duchesse de Valentinois, marquise des Baux, etc.
Radieuse à son arrivée, sa blondeur et sa silhouette longiligne sublimées par un tailleur bleu ciel, Charlene a traversé le parvis du Palais Princier sous les acclamations d'une foule qui bruissait depuis 16 heures en attendant de suivre la cérémonie civile sur des écrans géants. Des drapeaux multicolores de l'Afrique du Sud, pays de la mariée, flottaient, mêlés à ceux, rouge et blanc, de la Principauté.
20 minutes, deux "oui", l'affaire est entendue !
Dans la Salle du Trône du Palais princier, la célébration du mariage n'a pas traîné, sous l'impulsion de S.E.M. Philippe Narmino, président du Conseil d'Etat et officier d'état civil de la famille souveraine. Sous les yeux des princesses Caroline et Stéphanie, assises côte à côte, les mariés ont échangé leurs consentements, écouté la lecture du code civil, "enduré" l'égrenement des titres du prince monégasque et ont été déclarés mari et femme : "Je vous déclare unis par les liens du mariage." A cet instant, quelques minutes après 17 heures, Charlene Wittstock a fait son entrée dans la dynastie Grimaldi dont les racines remontent au XIIe siècle, accompagnée par les applaudissements des quelque 80 personnes présentes dans la Salle du Trône et des milliers d'autres rassemblées sur le parvis. La princesse Charlene est également devenue la belle-mère de Jazmin Grace, 18 ans, et Alexandre Coste, 7 ans, les deux enfants illégitimes connus du prince.
A l'issue de cette cérémonie rondement menée (une vingtaine de minutes), les jeunes mariés, rayonnants, ont fait une apparition guettée au balcon de de la Salle des Glaces afin de saluer les Monégasques. Qui dit balcon, dit baiser au balcon, et le couple s'est plié de bonne grâce à cette moderne tradition, après avoir échangé un premier baiser dans la Salle du Trône. Après ce fugace baiser difficile à bien voir depuis le parvis du Palais, les Carabiniers du prince ont joué un hymne composé pour la princesse Charlene, et Albert de Monaco a adressé un baiser à ses sujets, tandis que ses soeurs les princesses Stéphanie de Monaco et Caroline de Hanovre se montraient à une autre fenêtre en compagnie de leurs enfants.
La princesse Charlene sur la pointe des pieds
Peu après 18 heures, les Monégasques ayant reçu un carton d'invitation (7810 adultes étaient concernés) dans le courant du mois d'avril étaient gratifiés d'un cocktail dînatoire proposé sur la place du Palais princier, en prémices des festivités de la soirée sur le port, et Albert et Charlene recevaient des mains du maire Georges Marsan le cadeau des sujets de la Principauté. Le prince Albert a connu quelques problèmes de sonorisation au moment de prononcer son discours. Pas la princesse Charlene, qui a quitté l'estrade sans prononcer un mot. Une entrée sur la pointe des pieds dans la famille monégasque qui ne devrait pas réchauffer la cote de popularité de la très lisse Sud-Africaine sur le Rocher.
Les Monégasques avaient été invités à se cotiser depuis plusieurs semaines. Après les guitares offertes par les Eagles, héros du concert inaugural de jeudi soir offert aux résidents monégasques par leur prince, la tendance penchait pour une oeuvre d'art, les amoureux ayant demandé aux invités du mariage de préférer les dons caritatifs aux présents de luxe.
A 18h30, l'église Sainte-Dévote devait faire résonner ses cloches pour apporter sa voix aux vivats célébrant le mariage, enfin, du prince souverain de Monaco. La chapelle de l'église située dans le quartier de la Condamine attend désormais de recevoir la mariée, qui doit, comme la princesse Grace avant elle, venir déposer son bouquet sur l'autel contenant les reliques de la sainte patronne monégasque, à l'issue de la cérémonie religieuse conduite par Monseigneur Bernard Barsi.
Le prince Albert et la princesse Charlene donneront vers 20 heures le coup d'envoi de la sauterie vespérale en leur honneur, sur le port, prenant un bain de foule : un braai, barbecue sud-africain typique, et un grand buffet réalisé par le Fairmont où le champagne - de la maison Perrier-Jouët, qui accompagne déjà le Bal de la Rose de longue date - coulera à flots seront offerts aux résidents de la Principauté, ensuite conviés à déguster le show créé sur mesure par Jean-Michel Jarre. Le budget engagé dans le mariage s'élèverait à huit millions d'euros, soit deux fois plus que la somme initialement prévue, et la Principauté espère bien profiter des retombées touristiques suscitées par l'événement.
Conviviale et certes cruciale sur le plan "administratif", la cérémonie civile n'était clairement, en termes de spectacle, qu'une mise en bouche avant la cérémonie religieuse de samedi, à laquelle tout le gotha, cours royales, chefs d'Etat et célébrités de tous horizons, doit prendre part dans la Cour d'Honneur du Palais Princier.
G.J.