Ce mois d'août 2011 est celui de tous les bonheurs pour les royaux : des grossesses en cascade, des familles rayonnantes, des mariages sereins qui franchissent des paliers... et d'autres qui se célèbrent : dans la dernière catégorie, l'Allemagne connaîtra samedi 27 août probablement l'événement mondain le plus important de son année 2011, avec le mariage religieux du prince Georg Friedrich de Prusse, héritier légitime (après âpre joute judiciaire avec d'autres prétendants) du dernier empereur, et de sa compagne la princesse Sophie d'Isembourg (Sophie von Isenburg), à Potsdam, cérémonie qui sera suivie d'une fastueuse réception au château Sanssouci, le Versailles germanique, et dans ses jardins. Autour de 700 convives de marque y sont attendus.
Jeudi 25 août, le préambule de cette journée grandiose a eu lieu, avec la célébration de l'union civile du prince Georg Friedrich et de la princesse Sophie. Un peu moins de deux mois après leur élégante apparition sur le Rocher pour le mariage du prince Albert et de Charlene Wittstock, et moins d'un mois après leur participation à celui du prince Rashid de Jordanie avec Zeina, le jeune chef de la maison de Hohenzollern, âgé de 35 ans, et la fille du prince Franz Alexander von Isenburg, 33 ans, convoleront, sept mois après l'annonce de leurs fiançailles le 21 janvier 2011, commémorant par la même occasion le 950e anniversaire de la dynastie des Hohenzollern, famille dont sont issus électeurs brandebourgeois, rois de Prusse et empereurs d'Allemagne. Soit 900 ans de règne, jusqu'à l'abdication de Guillaume II en 1918 au sortir de la Première Guerre mondiale.
La cérémonie religieuse, oecuménique du fait de confessions respectives des mariés (luthérienne pour lui, catholique pour elle), sera célébrée en la Friedenskirche - l'Eglise de la Paix - de Potsdam, dans l'est du pays, à une trentaine de kilomètres de Berlin. Puis les jeunes mariés accueilleront leurs nombreux amis du gotha dans le parc du Sanssouci, fabuleux palais regardant des jardins d'inspiration anglo-chinoise qui fut la résidence d'été du roi de Prusse Frédéric le Grand, pour un dîner aux chandelles. Un concert caritatif dont les bénéfices iront à la Fondation Princesse Kira de Prusse aura ensuite lieu à Berlin.
Une romance plus forte que les querelles dynastiques
Cette journée devrait marquer l'apothéose de l'amour du prince Georg Friedrich et de la princesse Sophie, une jolie histoire qui a su éclore en dépit de circonstances aléatoires. Fils du prince Louis-Ferdinand de Prusse et de la comtesse Donata de Castell-Rüdenhausen (actuelle duchesse d'Oldenburg), arrière-arrière-petit-fils de l'empereur déchu Guillaume II dont il est l'héritier légitime, orphelin de son père à seulement un an, Georg Friedrich de Prusse sera élevé par sa mère et son grand-père Louis-Ferdinand Ier de Prusse, auquel il succédera à la tête de la maison impériale en 1994.
Instruit à Brême, Oldenburg et en Ecosse, Georg Friedrich, après un service militaire de deux ans (il est officier réserviste de la Bundeswehr), entreprend ses études supérieures à la prestigieuse Ecole des Mines de Freiberg, la plus vieille école d'ingénieurs au monde, et recroise alors son amie d'enfance Sophie d'Isembourg-Birstein, fille du chef de la brache senior de la maison princière d'Isenburg, sa lointaine cousine puisque tous deux descendent du grand-duc Charles II de Mecklenburg. Le timing n'est pas propice à la love story, puisque le jeune chef de la maison de Hohenzollern est en butte à la contestation de ses oncles le prince Friedrich Wilhelm et le prince Michael, dont les droits à la succession avaient été abrogés en raison de leurs mariages inopportuns au regard des règles de succession. La querelle dynastique va devant les tribunaux (suivez bien, ces quelques années dans les couloirs de palais de justice furent intenses) : les oncles gagnent devant la cour régionale de Hechingen puis devant la cour régionale supérieure de Stuttgart en 1997, qui accède à leur requête en reconnaissant l'inconstitutionnalité du déclassement du fait de leurs mariages. Jugement cassé par le tribunal fédéral allemand. L'affaire repassse devant les magistrats régionaux, et, cette fois, la décision est en faveur de Georg Friedrich. Les demandeurs se retournent alors vers le tribunal constitutionnel fédéral. Et finalement, en octobre 2005, un tribunal régional statue définitivement en faveur du jeune homme, concédant que ses oncles et les autres enfants de Louis Ferdinand Ier peuvent néanmoins prétendre à une part de l'héritage prussien.
Dès lors, Son Altesse Impériale et Royale Georg Friedrich de Prusse peut assumer sa mission spirituelle, avec une conscience très moderne puisqu'il se satisfait pleinement du système politique actuel en Allemagne et n'entend pas y exercer de rôle, et, surtout, se consacrer à sa romance avec la princesse Sophie. Une idylle en passe de rejoindre superbement les annales du gotha.
G.J.