Luc Plamondon, c'est presque une marque. Rare dans les médias, le Québécois starisé par quelques-unes des comédies musicales francophones les plus marquantes de l'histoire du genre - Starmania (en voie d'adaptation au grand écran) et La Légende de Jimmy avec Michel Berger, Notre-Dame de Paris (qui effectue un baroud d'honneur) avec Richard Cocciante - fait partie de ces travailleurs de l'ombre de l'industrie musicale qui jouissent d'une notoriété éclatante.
Parolier des plus grands, de Barbara à Céline Dion, de Johnny Hallyday à Julien Clerc (la liste est si longue !), sa contribution à la chanson française est monumentale, son rapport à la langue française viscéral. Et c'est d'ailleurs cette loyauté qui le pousse aujourd'hui à faire une sortie assez virulente pour défendre une langue française qu'il estime menacée au Québec.
Dans un article éloquemment intitulé Plamondon en croisade, le site québécois Canoë.ca, reprenant une interview recueillie par Le Journal de Montréal dans le cadre, relaye le véritable combat que livre Luc Plamondon, en marge de sa présence mardi soir au gala de la Socan (Société des Auteurs Compositeurs Canadiens), où il doit recevoir un prix honorifique couronnant ses quarante années de carrière.
Dans cet entretien, Luc Plamondon, 68 ans, met radicalement en question, avec force exemples, la "survie du français". Une problématique "urgente", selon lui.
Il rappelle à ce titre le bras de fer qu'il a dû livrer à l'Opéra de Montréal : "Cette anglicisation me dérange assez pour que j'aie menacé de faire un scandale à l'Opéra de Montréal, récemment, lors de la présentation de mon opéra Starmania. La veille de la première, lorsque j'ai vu les sous-titres en anglais, je les ai fait retirer (...) J'allais tout de même pas me plier à cela pour faire plaisir à trois membres du conseil d'administration de l'Opéra qui ne parlent pas français..."
Dans le collimateur, la prédominance de l'anglais, langue mondiale mais aussi celle du voisin nord-américain. Il fournit un nouvel exemple, observant le phénomène dans les soirées de charité : "Je me demande pourquoi on se sent obligé de faire des discours dans les deux langues. Nous sommes une nation, même le premier ministre Stephen Harper le reconnaît. Assumons-nous comme nation francophone. Notre langue officielle est le français. Soyons fiers de cela." Plus loin, il en appelle à nouveau à une volonté politique de remettre les choses d'aplomb : "Nous avons une nation, et la langue officielle est le français, donc assumons-nous. C'est tout de même pas normal qu'on parle plus le français aux Jeux olympiques de Pékin qu'à Vancouver."
Forcément, il voit d'un oeil suspicieux la polémique dont a fait l'objet le gala de l'ADISQ, qui distribue chaque année les Félix (les Victoires de la Musique locales) et a "oublié" dans son récent palmarès des révélations... en langue anglaise (Bobby Bazini, Radio Radio) : "La musique anglo-québécoise peut être honorée dans d'autres catégories, comme dans la course au Félix donné à l'artiste qui s'est le mieux distingué dans une autre langue que le français. J'aime bien Coeur de pirate, mais là, je ne suis pas d'accord avec elle lorsqu'elle dénonce le fait que le groupe hip-hop Radio Radio n'ait pas remporté un Félix. Les artistes qui chantent en anglais ont leurs catégories, il faut garder ces règles dans le contexte actuel où le français doit à nouveau se battre pour assurer sa survie. En France, l'année où des Victoires ont été remis à des artistes qui chantaient en anglais, ce fut un choix contesté."
Dans le même registre, il pointe du doigt la programmation du Festival d'été de Québec, où les artistes francophones ont dû se contenter d'un public amoindri l'après-midi tandis que des mastodontes "qui n'ont pas besoin des fonds gouvernementaux pour se faire vivre" tels que Metallica et Paul McCartney jouaient en soirée.
Et lorsqu'il relève que dix millions d'Haïtiens parlent français, contre seulement cinq millions "frileux" de francophones au Québec : "Elle sera où notre nation dans quelques années ? Je sens l'urgence..."
Entretien à lire en intégralité en cliquant ici.