Le procès des dix personnes soupçonnées d'être responsables de l'assassinat d'Hélène Pastor, 77 ans, et son chauffeur Mohamed Darwich en mai 2014 devant un hôpital de Nice se tient devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône à Aix-en-Provence. Le gendre de la milliardaire, Wojciech Janowski, est soupçonné d'avoir commandité cette exécution. Il aurait demandé à son coach sportif, Pascal Dauriac, de recruter une équipe pour "liquider la vieille" comme l'a raconté ce dernier lors du procès. En juin 2014, Janowski avait avoué devant les enquêteurs avant de se rétracter fermement, son avocat expliquant il avait pu mal comprendre les subtilités de notre langue. On a beaucoup entendu parler de sa garde à vue durant laquelle on lui aurait tout fait ou presque... Mais une vidéo a été diffusée dans l'enceinte du tribunal, mercredi 3 octobre 2018. Vidéo qui met mal à l'aise la défense de Janowski.
Les images des aveux ont fait leur effet. "On est loin du tableau apocalyptique qu'il a lui-même brossé de ces quatre jours d'interrogatoires", écrit Le Figaro dans son édition du 6 octobre. La vidéo montre le sixième interrogatoire mené notamment par le commandant de police Catherine Messineo. Elle est ferme et polie. À ce moment-là, d'autres témoignages désignent déjà Janowski comme le commanditaire. "Il semble détendu, remarque Le Figaro. Il maîtrise parfaitement le français en dépit d'un fort accent polonais."
Devant la cour Pascal Dauriac a raconté comment Janowski l'avait presque contraint à organiser cette exécution. Dans ses aveux, l'intéressé ne dit pas tout à fait la même chose : "Un jour, finalement, j'ai cédé [aux propositions de Dauriac] (...) Je lui ai demandé s'il pouvait résoudre le problème avec ma belle-mère. Le, au singulier. Ce n'était pas facile de dire 'tuer ma belle-mère' mais je suis sûr qu'il l'a compris comme ça."
Les aveux n'ont pas l'air d'avoir été escamotés et encore moins d'être le résultat d'un malentendu. Mais ce qui s'en dégage, c'est peut-être un mobile. Gildo Pallanca, fils de la victime et frère de Sylvia Pastor, la compagne depuis vingt-six ans de Janowski, a exprimé avant le procès son besoin de comprendre le mobile de cet assassinat. Pourquoi en arriver-là, alors que l'argent ne manquait pas ? Janowski dit avoir fait ça pour Sylvia : "Ma femme était maltraitée jour après jour par sa mère, qui était malade psychologiquement. Cette maltraitance dure depuis le jour où je l'ai rencontrée, le 25 juillet 1986. J'ai ramassé Sylvia à la petite cuillère. Sa mère et son frère Gildo étaient des vipères, ils voulaient la détruire."
Dans ces aveux, il est beaucoup question de la souffrance de Sylvia Pastor, des sentiments de Janowski pour elle. "Je me suis tué en faisant ça, reconnaît-il devant l'enquêtrice. Ma seule motivation, c'est mon amour pour ma femme." Quelques jours après, Me Erick Campana faisait savoir que Wojciech Janowski était "revenu sur ses dépositions pendant la garde à vue, en contestant être le commanditaire des faits qu'on lui reproche", ajoutant qu'il "avait mal apprécié la portée des termes employés par les services de police, qu'il parlait français, mais qu'il ne comprenait pas toutes les nuances de notre langue".
Pour Le Figaro, cette vidéo "rebat les cartes du procès Pastor". Surtout, elle met dans une position encore plus délicate un accusé qui jusque-là tentait de "détourner les questions embarrassantes au mépris, souvent, de toute vraisemblance". Vendredi, un expert psychiatrique a passé en revue le profil des accusés. Selon lui, Janowski est un homme d'une intelligence "moyenne supérieure", à la personnalité "affirmée, (...) très bien structurée". Il ne "présente aucun trouble psychique ou psychiatrique qui ait pu altérer ses actes".
Lors de son témoignage à la barre, Sylvia Pastor a déclaré avoir tout perdu : "Ma mère et l'homme de ma vie." Mercredi, à peine l'audience levée, elle s'est effondrée. Le procès doit se poursuivre jusqu'au 19 octobre.