Etait-ce parce qu'il avait "une peur bleue de la mort depuis l'âge de 18 ans", comme vient de le confier son manager de longue date, que Michel Legrand se projetait vers l'avenir avec la fougue d'un éternel jeune premier, passionné et intarissable ? Réduit au silence dans la nuit du 25 au 26 janvier 2019, le compositeur oscarisé et adulé a hélas eu le temps de la voir rôder... Pour le quotidien Le Parisien, Philippe Guiboust, qui l'accompagnait dans ses aventures depuis 21 ans, a dévoilé la cause de son décès, de ses derniers jours tourmentés à son départ dans la sérénité.
Michel a fait une septicémie
"Michel Legrand s'est éteint chez lui à 3h du matin aux côtés de son épouse la comédienne Macha Méril", avait sobrement fait savoir à l'AFP l'attaché de presse du musicien, décédé à l'âge de 86 ans. Une déclaration laconique qui pouvait laisser à penser qu'il était parti dans son sommeil, paisiblement, sans heurts... Cela n'a pas été le cas. "Michel était hospitalisé depuis deux semaines à l'hôpital américain de Neuilly (Hauts-de-Seine), soigné pour une infection pulmonaire grave. Jusqu'à jeudi matin, les médecins étaient très optimistes sur un retour à la maison et puis son état s'est subitement dégradé. Il a fait une septicémie dont il ne s'est pas remis", a révélé Philippe Guiboust quelques heures après le funeste épilogue.
Précisant que Michel Legrand, qui "avait une peur bleue de la mort depuis l'âge de 18 ans", avait demandé aux médecins à ne pas faire l'objet "d'acharnement thérapeutique", il souligne qu'il est parti "à 2h45 très entouré et serein" : "Il a eu une belle fin de vie avec Macha et il est mort en plein succès", observe-t-il, énumérant pêle-mêle le succès exceptionnel de Peau d'âne (actuellement au théâtre Marigny fraîchement rouvert), les quarante concerts qui étaient programmés cette année dans le monde entier et ceux des 17 et 18 avril au Grand Rex, qui donneront lieu à des soirées hommage.
Philippe Guiboust avoue qu'il avait déjà pensé perdre Michel Legrand à plusieurs reprises par le passé : un mois d'hôpital pour une pneumonie l'an dernier, une crise de tachycardie énorme il y a trois ans... "En 21 ans de compagnonnage et 1 004 concerts, il m'a fait de telles frayeurs", relate le manager, stupéfait d'avoir devant lui un véritable "surhomme" capable de remonter sur scène quelques heures plus tard ou de jouer avec 40 degrés de fièvre au Palais des Congrès pour ses 80 ans. Un "génie", parfois intransigeant envers lui-même et les autres, mais aussi un "enfant", capable de "piquer des colères terribles et des crises incroyables", dépeint-il encore dans ces confidences précieuses faites au Parisien. En attendant, peut-être, celles de Macha Méril, dont on ne saurait mesurer le chagrin, veuve de ce grand amour qu'elle avait miraculeusement retrouvé - pour ne plus le quitter - il y a quelques années seulement.