Mort d'Omar Sharif : Lawrence d'Arabie, Le Docteur Jivago... Une vie de jeu(x)...
Publié le 10 juillet 2015 à 19:11
Par Samya Yakoubaly | Rédactrice
Cinéphile, elle adore regarder des bande-annonces et des moments historiques à la télévision. Le prochain James Bond ou le discours d’investiture de Barack Obama lui donnent les mêmes frissons.
On avait appris il y a quelques mois qu'il était atteint de la maladie d'Alzheimer. L'acteur légendaire a disparu, laissant derrière lui une grande carrière et sa passion pour les jeux.
Omar Sharif, icône du 7e Art, est mort à l'âge de 83 ans. © Getty / Stormshadow
Omar Sharif et son épouse Faten Hamama, aux côtés de leur fils Tarek, en 1965, sur le tournage du Docteur Jivago
Omar Sharif et son fils Tarek à Madrid le 27 décembre 2002
Omar Sharif Jr à la première d'Imitation Game à New York le 17 novembre 2014.
Omar Sharif lors de la conférence de presse pour la vente aux enchères de la "Federation fund's" à Moscou, le 28 novembre 2014
Omar Sharif à la soirée caritative "Chain of Hope" à Londres, le 21 novembre 2014
L'acteur Omar Sharif reçoit la médaille de la ville de Marseille par le premier adjoint Roland Blum, le 17 juin 2013
Omar Sharif à la cérémonie de remise des Prix Henri Langlois 2013 à l'Hôtel de Ville de Vincennes, le 28 janvier 2013
Omar Sharif à Vienne en Autriche le 15 mars 2013.
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Le Docteur Jivago n'est plus. C'est avec une grande émotion que le monde entier a appris la mort d'une icône du cinéma, Omar Sharif, qui a succombé ce vendredi 10 juillet 2015 à une crise cardiaque, selon son agent londonien. Il avait 83 ans et souffrait de la maladie d'Alzheimer. Son petit-fils, Omar Sharif Jr., enfant de son fils unique Tarek, avait posté récemment une tendre photo le représentant avec son grand-père ; une photo en commentaire de laquelle il remerciait ce soir le public pour toutes les prières et les marques de soutien adressées à sa famille, confiant combien le défunt va lui manquer.

Né à Alexandrie en 1932, Omar Sharif, Michel Chalhoub de son vrai nom, venait d'une famille d'origine libanaise, fils de Joseph Chalhoub, marchand de bois précieux, et de Claire Saada, et a été élevé dans le rite grec-catholique melkite. A 11 ans, sa mère, le trouvant trop gros, l'a envoyé dans une école anglaise, le Victoria College d'Alexandrie, dans l'espoir qu'il y soit moins tenté par la nourriture. Il y apprendra les mathématiques, la physique, le français ainsi que cinq autres langues, qu'il parlait plus ou moins couramment : l'arabe, l'anglais, le grec, l'italien et le turc. Mais s'il revient diplômé en mathématiques et en physique de l'Université du Caire, il travaillera avec son père dans un premier temps, puis tentera d'apprendre le métier d'acteur à la Royal Academy of Art de Londres, un choix qui bouleversera à jamais sa vie.

Le réalisateur Youssef Chahine, égyptien lui aussi, le fait jouer dans Le Démon du désert (1954) et Michel Chalhoub décide d'opter pour le nom de scène Omar El Sharif. Le cinéaste et l'acteur se retrouveront dans Les Eaux Noires - présenté au Festival de Cannes - face à la star égyptienne Faten Hamama (également disparue cette année), qui deviendra sa femme. Pour elle, il se convertira à l'islam. Séparés en 1966, il reviendra au christianisme après leur divorce en 1974 selon Al Jazeerah, mais confiera des années plus tard "se sentir agnostique". Ensemble, ils ont eu un fils, Tarek, né en 1957. Son seul et unique enfant.

© Youtube

Durant les années 1950, Omar Sharif accède au statut de célébrité en son pays et il joue dans plus de vingt films, parmi lesquels Ayyamna el helwa avec le chanteur Abdel Halim Hafez. Mais sa notoriété devient mondiale lorsqu'il est choisi pour jouer le prince Ali Ibn Kharish dans Lawrence d'Arabie de David Lean, face à Peter O'Toole. C'est à ce moment-là qu'il prend le nom d'Omar Sharif. Son ascension est fulgurante puisqu'il décroche le Golden Globe de meilleur acteur dans un second rôle en 1963 et une nomination aux Oscars. Pourtant, Omar Sharif n'avait pas prédit le succès de ce chef-d'oeuvre, ni le sien : "Je pense que c'est un grand film, mais je ne suis pas très bon dedans. Je ne pensais pas non plus que des gens iraient voir le film - trois heures et quarante minutes de désert et aucune fille !", racontait-il dans The Independent.

© Allocine

La star décide de s'installer à Hollywood et signe un contrat de sept ans avec Columbia Pictures. Sa vie en Amérique coïncide avec sa séparation avec la mère de son fils, mais les deux acteurs resteront en bons termes. "Elle était l'amour de ma vie", a estimé Omar Sharif en interview pour The Independent. Il ajoutera vivre depuis une existence solitaire : "Depuis que j'ai 31 ans, je vis dans des hôtels."

Dans son autobiographie Eternel masculin, on peut deviner les raisons de la séparation des deux stars. Il se souvient, à propos de l'époque du tournage de Lawrence d'Arabie, de ses week-ends de fête : "Nous buvions sans nous arrêter [avec Peter O'Toole] pendant deux jours, nous chassions les filles dans tous les clubs." Un comportement qui a failli ruiner l'avant-première de Lawrence d'Arabie puisque les deux hommes sont arrêtés la veille après avoir flambé avec des seringues : "Le producteur Sam Spiegel nous a fait sortir de prison. Il est arrivé avec une armée de six avocats. Et bien sûr nous étions terrifiés."

Omar Sharif continue sur sa lancée internationale en jouant dans Le Docteur Jivago, adaptation du roman de Boris Pasternak. Il décroche le Golden Globe du meilleur acteur grâce à sa prestation dans la peau du poète médecin russe Youri Jivago.

© Allocine

Très éclectique, il incarne par la suite Gengis Khan, le tsar Nicolas II, le Capitaine Nemo et joue notamment dans Funny girl de William Wyler (1968) avec Barbra Streisand. La France ne resistera pas non plus au talent et au charisme d'Omar Sharif et il donnera ainsi la réplique à Catherine Deneuve (Mayerling - 1968) et Jean-Paul Belmondo (Le Casse - 1971). Le réalisateur à l'oeuvre lors de cette collaboration, Henri Verneuil, fera appel à ses services plusieurs fois, pour Mayrig et 588, rue Paradis.

C'est toutefois en 2004 que le grand Omar Sharif, couronné un an avant pour sa carrière à la Mostra de Venise, obtiendra en France la consécration, grâce à Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran, de François Dupeyron. Cette année-là, l'Académie lui remet le César du meilleur acteur, saluant sa prestation en épicier philosophe.

© Allocine

En 2005, il donne sa voix au lion Aslan dans les doublages français et italien du film d'aventure Le Monde de Narnia : Le Lion, la Sorcière blanche et l'Armoire magique, et renouvelle l'expérience du doublage l'année suivante comme narrateur de O Gengis. La maladie l'avait contraint à s'éloigner des plateaux en 2012, après une dernière apparition dans Rock The Casbah, de Laïla Marrakchi, clôturant une carrière riche de plus de 70 films.

Connu dans le monde entier comme acteur, Omar Sharif l'est aussi pour son goût pour les jeux. Le bridge d'abord. Aux Olympiades de Bridge de Deauville en 1968, il représentait l'équipe d'Égypte, opposée à celle du champion du monde italien Giorgio Belladonna. Quelques années plus tard, c'est face à ce même numéro 1 mondial qu'Omar Sharif faisait une tournée internationale avec la Lancia Team. Il est devenu vice-champion de France open en 1971 et vice-champion d'Europe seniors par équipes en 1999 à Malte avec l'équipe de France (associé entre autres à Paul Chemla). Sans surprise, il a fréquenté régulièrement les casinos.

Des établissements qui ne lui ont pas laissé que des bons souvenirs. Omar Sharif a dû répondre de faits de violence et outrage à un agent de la force publique en 2003 et a été condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis assorti d'une amende de 1 500 euros. Il avait perdu son sang-froid au casino d'Enghien-les-bains, insultant copieusement un policier de la direction des courses et des jeux du ministère de l'Intérieur, chargé de surveiller en civil et en toute discrétion le bon déroulement des jeux, qui lui avait demandé de se calmer. Par ailleurs, Pour payer ses dettes de jeux, il devra vendre en urgence le seul appartement qu'il ait jamais possédé, à Paris.

Les courses, vous le savez, c'est ma grande passion !

Cependant, c'est certainement pour les courses hippiques que le joueur restera le plus dans les mémoires. Sa réplique pour les publicités de Tiercé magazine est dans toutes les mémoires : "Les courses, vous le savez, c'est ma grande passion !"

© Youtube

L'artiste égyptien avait fait parler de lui récemment en raison de son soutien pour son petit-fils, Omar Sharif Jr. (enfant de son fils unique Tarek), qui a fait son coming-out. En mars 2012, le jeune homme déclarait dans le magazine The Advocate : "Je suis Égyptien, je suis juif, et je suis gay." Son grand-père avait alors pris la parole, évoquant "un jeune homme mature" qu'il soutenait de tout son coeur selon Gala : "Personne n'a le droit de contrôler ses actions ou de limiter sa liberté."

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