La Sacem annonçait jeudi, via l'AFP, le décès de l'artiste, parolier et ancien résistant Jacques Demarny mort mercredi 12 janvier 2011 à l'âge de 85 ans, qui officia en tant qu'administrateur et en tant que président au sein de l'organisme de protection des droits des artistes. Claude Lemesle, l'actuel président de la Sacem, accompagnait ce funeste communiqué d'un éloge funèbre émouvant, qui soulignait le tempérament "vraiment impressionnant d'humanité, de force, de sagesse" du défunt, et "la cohérence formidable entre l'homme et l'auteur".
Enrico Macias n'a pas tardé à réagir à son tour, bouleversé par la disparition de celui qu'il considérait comme "un frère", "un deuxième moi-même", qui accompagna sa carrière de chanteur au fil de centaines de chansons. "Il a été la chance de ma vie dans ma carrière artistique. On a écrit plus de 500 chansons ensemble, on a fait le tour du monde. Il était tout le temps près de moi, très proche de ma famille aussi", s'est ému le chanteur de Constantine. "C'est un frère que j'ai perdu, un deuxième moi-même. On ne pouvait pas créer chacun de notre côté, il fallait qu'on se voit tout le temps."
Né à Paris en 1925, Jacques Demarny avait grandi à Alger avant de faire son retour en métropole en 1940 et de s'engager dans la Résistance peu avant ses 20 ans. Après la guerre, en 1947, il fait ses débuts d'artiste dans les music-halls parisiens, en duo avec son frère Jean, puis multiplie les expériences - animateur sur Europe 1, Monsieur Loyal dans un cirque, comédien, chanteur... A la fin des années 1950, il prend le virage de la poésie, décidant d'écrire pour les autres. Les premières, Annie Cordy (Allez hop) et Danielle Darrieux (Prendre le temps de s'aimer davantage) profitent de ses talents de parolier, qui serviront plus tard Daniel Guichard, Tino Rossi, Georges Guétary, Alice Dona, Nana Mouskouri, Demis Roussos, ou encore Gérard Lenorman.
Mais c'est surtout son association et sa profonde amitié avec Enrico Macias, avec lequel il forma un tandem inséparable, qui demeure légendaire : pour le chanteur de Constantine, Demarny écrira plus d'un tube, dont le premier n'est autre que l'hymne Enfant de tous pays, qui scella leur rencontre lorsque Jacques Demarny en proposa le texte à Enrico Macias un soir de concert à Bobino. La revue Je chante publiait le 4 janvier 2010 un superbe entretien avec Jacques Demarny (à lire en intégralité en cliquant ici), qui commençait par revenir sur ce premier contact, en ces termes : "J'ai rencontré Enrico Macias pour la première lorsque j'étais allé voir Dario Moreno à L'ABC. Macias y passait en vedette américaine. Beaucoup d'amis pieds-noirs m'en avait parlé, ils avaient été bouleversés par son passage dans l'émission Cinq colonnes à la une. Ce soir-là, à l'ABC, j'ai été surpris de voir un garçon un peu gros et maladroit, mais qui avait cette espèce de charisme qui est quelque chose qui ne s'apprend pas... C'est tout de suite après que Pascal-René Blanc et moi avons eu l'idée de lui écrire une chanson qui s'appelait Enfants de tous pays. Trois semaines plus tard, nous sommes allés le voir à Bobino."
Suivront maints succès conjoints tels que Les gens du Nord, Les millionnaires du dimanche, J'ai quitté mon pays, Mon coeur d'attache, Malheur à qui blesse un enfant...