Une cuisine authentique qui ne suit pas la mode, un franc-parler et un coq tatoué sur l'épaule gauche, Paul Bocuse n'était définitivement pas un chef comme les autres. Son désir d'accorder une interview posthume réalisée en plusieurs étapes, des années avant sa mort, le montre aussi.
Dans son numéro du 25 janvier, Le Point publie un questions/réponses très particulier. Bien avant de s'éteindre le 20 janvier 2018 chez lui, à Collonges-au-Mont-d'Or, dans son sommeil comme l'a annoncé en exclusivité Purepeople.com, Paul Bocuse évoquait déjà sa vie, son succès, sa mort. C'est après un entretien réalisé en mars 2013 avec le journaliste Thibaut Danancher que le "pape de la gastronomie" décédé à 91 ans – dont les obsèques ont été célébrées le 26 janvier à Lyon –, lui a demandé de rédiger cette interview posthume "au fil de plusieurs rencontres". Leur dernier échange remonte à près d'un an, en février 2017 dans sa maison de la région Auvergne-Rhône-Alpes où se trouve son restaurant, L'Abbaye du Pont de Collonges.
Malgré la maladie, "pas pressé" de rejoindre ses amis déjà partis, le "Cuisinier du siècle" se voyait vivre encore des années, jusqu'à devenir centenaire. "J'ai encore le temps. Je vais vivre jusqu'à 100 ans, si Parkinson me laisse tranquille", avait-il déclaré.
J'ai une sorte de "monoPaul"
Détenteur de trois étoiles au Guide Michelin depuis plus de cinquante ans, un record, "Monsieur Paul" prônait la cuisine "à la fois simple et authentique", celle qui lui a permis une telle longévité. "Celle que je fais au beurre, à la crème et au vin. La même depuis cinquante ans avec des plats signatures identiques sur la carte. Et surtout avec le feu !", avait-il lancé, n'hésitant pas une comparaison inattendue : "Car une cuisine sans feu, c'est comme une femme sans cul"."Je n'ai jamais cédé à la mode parce qu'elle se démode", se défendait-il. Travailler une cuisine authentique ne l'a pour autant pas empêché de se démarquer comme lorsqu'il a imaginé une chaîne de fast-foods en 2008, Ouest Express, avec des hamburgers "made by Bocuse". "Je le répète souvent, l'important n'est pas de sortir de Saint-Cyr, mais de l'ordinaire", avait martelé le gastronome qui aimait jouer la carte de la légèreté quand il était interrogé sur son succès mondial et son nom majoritairement cité. "Parce que Bocuse, c'est facile à prononcer ! Avec mon nom, j'ai une sorte de 'monoPaul'", aimait-il plaisanter.
Beaucoup moins de plaisanterie pour s'adresser à la relève, aux jeunes à qui il voulait adresser un solide message : celui de la vertu de la force travail : "Le travail, encore le travail et surtout le travail !""Et puis, aussi, veiller, à laisser un héritage aux générations futures", avait-il prôné. Cette transmission "d'homme à homme", Paul Bocuse peut se féliciter de l'avoir assurée avec succès.
L'intégralité de l'interview posthume de Paul Bocuse est à retrouver dans Le Point en kiosques le 25 janvier 2018.