C'est une nouvelle tempête qui secoue le cinéma français ces dernières semaines : après plusieurs décennies de silence, l'actrice Judith Godrèche a décidé de dénoncer les violences dont elle dit avoir été la victime durant son adolescence. Et notamment de deux réalisateurs : Benoît Jacquot, avec qui elle a vécu à partir de ses 14 ans et dont elle dit avoir été "sous l'emprise" et Jacques Doillon, contre qui elle a déposé une plainte pour viol sur mineur ces derniers jours.
Selon elle, le réalisateur l'aurait agressée sur le tournage du film La fille de 15 ans. Agée du même âge, la jeune femme aurait été abusée pendant une scène dans un lit, en présence de Jane Birkin, qui était alors la compagne de ce dernier. Des "mensonges", selon Jacques Doillon, qui a tenu à se défendre par une déclaration transmise à l'AFP ce samedi 10 février.
"Que Judith Godrèche et d'autres femmes à travers elle aient à coeur de dénoncer un système, une époque, une société, est courageux, louable et nécessaire. Mais la justesse de la cause n'autorise pas les dénonciations arbitraires, les fausses accusations et les mensonges", a-t-il notamment écrit, réfutant également avoir changé le scénario de son film pour y intégrer une scène intime.
"Tout d'un coup, (Doillon) décide qu'il y a une scène d'amour, une scène de sexe entre lui et moi", avait raconté Judith Godrèche sur France Inter. "J'enlève mon pull, je suis torse nu, il me pelote, me roule des pelles", s'était-elle souvenue, acquiesçant à la question de savoir si le réalisateur avait "abusé" d'elle.
Mais tout cela est faux pour Jacques Doillon. "Cette scène est dans le scenario original. C'est la scène 79 où il est notamment écrit: 'Affolés, soulevés, ils font l'amour'. Judith Godrèche a évidemment lu et relu le scenario puisqu'elle a même prétendu l'avoir écrit", ajoute-t-il, confirmant cependant avoir remplacé l'acteur qui devait jouer avec elle, comme elle l'avait expliqué. "J'ai mis fin à son engagement en fin de première semaine de tournage en raison de textes insuffisamment sus et de problèmes de rythme qui ne s'accordait pas à celui des adolescents", s'est-il justifié.
"Bouleversé" par le mouvement MeToo, le père de 5 enfants refuse cependant d'y être associé, tout comme il réfute le fait d'être proche de Benoît Jacquot, lui aussi visé par la plainte. "Je regarde avec attention ce bouleversement, pour ne pas dire cette révolution, initié et porté par les femmes dont la parole se libère depuis plusieurs années désormais. (...) Cependant, je n'ai jamais commis les actes qui me sont reprochés et j'apporterai à la justice, puisqu'elle est désormais saisie, tous les éléments factuels dont je dispose pour démontrer mon innocence", assure-t-il.
Une défense mise à mal par la parution de deux autres témoignages cette semaine. Dans un article du Monde, Jacques Doillon a en effet également été mis en cause par les actrices Isild Le Besco et Anna Mouglalis. La première assure avoir été évincée d'un tournage après avoir "refusé de coucher avec lui" et la seconde dit avoir été "embrassée de force" avant de le repousser. Dans sa déclaration, M. Doillon affirme pour sa part qu'Isild Le Besco lui "avait fait croire qu'elle était retenue sur un autre tournage alors qu'elle était en vacances" et il qualifie de "grotesque" l'accusation d'Anna Mouglalis.
Jacques Doillon est présumé innocent des faits qui lui sont reprochés jusqu'à la clôture définitive du dossier.