-M- : En rockstar, son Mojo lui fait faire n'importe quoi

Comme Austin Powers il y a quelques années, comme Orelsan il y a quelques mois, Matthieu Chedid en -M- a retrouvé son mojo, avec un grand M : ça saute littéralement aux oreilles avec son nouveau single Mojo, paru début septembre, et ça crève les yeux avec le clip qui l'accompagne depuis quelques jours.

L'avait-il jamais perdu ou même trouvé, son mojo de mâle ? Possible. C'est du moins ce que l'illustre Machistador avait laissé entendre au moment de la parution, en 2010, de son précédent album, Mister Mystère, qui signait la renaissance en homme du bondissant personnage : "J'essaie d'être sexuel tout en étant pudique. Mes trois premiers disques représentent mon enfance artistique. Ils sont de couleur rose bonbon, festifs. Là, j'entre dans un monde différent. C'est plus masculin, plus viril et plus assumé. (...) J'ai perdu pas mal de poids, j'ai le sentiment d'avoir fait ma mutation de l'adolescence à l'âge adulte...", expliquait-il alors.

Si la mue/mutation/maturation s'est opérée avec Mister Mystère, elle se prolonge et s'exprime dans ce très rock et très primal Mojo, et griffé d'un retour aux sources radical et jubilatoire, qui préfigure la sortie du sixième album studio de -M-, le 12 novembre 2012, baptisé Îl. Une île au masculin, un "il" qui prend le large ?

Si Matthieu Chedid est officiellement un grand garçon conscient de sa virilité pour Îl et pour Mojo, composé avec Brad Thomas Ackley et Dorion Fiszel, il prend un plaisir d'autant plus jouissif à jouer les loulous provocateurs et à rouler des mécaniques dans le clip réalisé par Beryl Koltz. Plus rockstar que jamais, -M- empile ses punchlines séductrices au rythme de poses arrogantes et de secousses sexuelles, dans l'emballement des guitares et des percussions. Du coup, le refrain-gimmick ("Mo-mo-mo-mo-mo-mo-mo-mo-jo"), entêtant à l'écoute, se double à l'image d'une chorégraphie très kitsch, totalement délirante et zombie-like, facile à reproduire : il faut sautiller sur la pointe de pieds, hausser les épaules en ayant les bras (et éventuellement la mâchoire inférieure) ballants.

Au fil du clip, -M-, lunettes extravagantes sur le nez, et ses musiciens investissent tout Paris avec leurs pas de danse comiques et leur folie contagieuse. Débordants de mojo, ils jouent les agitateurs dans les rues, devant les bars, devant les pressings, devant les stations de RER, et jusque dans les points Autolib, se transforment en rockstars excessives en concert nocturne ou en flashmob. Matthieu Chedid, qui était bien sage dans le corps gigantesque de Francoeur pour le film d'animation Un monstre à Paris, dévore ces scènes improvisées et s'affiche en héros du air guitar, se contorsionnant sur son instrument invisible avec des inconnus complices et même Thomas Dutronc.

C'est en faisant n'importe quoi qu'on devient n'importe qui, comme dirait l'autre ; mais quand on est déjà quelqu'un, n'importe quoi fait sens. De bon augure pour la prochaine tournée de -M-.