Dernier gros dossier fiscal de l'année 2012 en Belgique, après les affaires Bernard Arnault et Gérard Depardieu, celui du... roi Albert II. Un an après avoir annoncé des mesures d'austérité pour la Maison royale, en signe de solidarité avec la population face au contexte économique difficile, le sixième roi des Belges, après des vacances en famille dans sa résidence du sud de la France (à Châteauneuf-Grasse), aborde 2013 avec un budget revu à la hausse à hauteur de 2,5%. Malaise...
L'an dernier, l'annonce du renoncement spontané aux 3% - soit 350 000 euros - d'augmentation automatique de la liste civile (budget alloué au fonctionnement de la famille royale, à la charge du contribuable) avait été accueillie avec une certaine satisfaction, après, déjà, plusieurs années d'efforts en ce sens. Et le souverain de mettre en exergue le désir de la Maison royale de "contribuer volontairement aux mesures d'économies décidées". A l'inverse, le mécontentement gronde à l'heure où les comptes royaux reprennent leur progression, alors que la dotation royale devait à nouveau être gelée en 2013 et à l'heure où le gouvernement d'Elio di Rupo a présenté un plan d'économies de 3 milliards d'euros, combiné à un processus de modération salariale. Autrement dit, on s'oriente vers un gel des salaires pour les citoyens, mais le premier d'entre eux, déjà mieux rémunéré qu'un patron du CAC 40, perçoit une augmentation de 300 000 euros. La solidarité semble avoir fait long feu. Mais en réalité, le monarque a la parade : ces 300 000 euros supplémentaires, il a promis de les dépenser afin de contribuer à la relance économique du pays. Ils seront utilisés pour la rénovation de ses résidences. Bémol : l'an dernier, le roi Albert s'était assis sur son augmentation et avait sorti son chéquier pour financer de sa poche l'entretien des résidences royales. Il contribuait donc déjà à l'effort économique, sans prendre d'augmentation au passage...
Le fait est que le roi a droit, constitutionnellement, à cette augmentation annuelle, inscrite dans les textes depuis 1993, l'article 89 de la Constitution stipulant que "ce montant est adapté à l'indice des prix à la consommation". Autrement dit, la liste civile est indexée sur l'inflation annuelle, ce qui n'est pas le cas du salaire du citoyen lambda. Mais ce n'est pas tout : La Tribune a également noté que la loi de 1993 prévoit une "revalorisation de la liste civile sur base de l'évolution des traitements réels des services d'administration générale de l'Etat fédéral et des augmentations de cotisations patronales à la sécurité sociale". Un dispositif qui a permis au roi de bénéficier d'une progression de 91,7% de sa liste civile depuis 1993 lorsque l'indice des prix n'a progressé que de 47,5% (à rapporter à la progression du salaire moyen en Belgique sur la même période, de 54%).
La liste civile dont Sa Majesté le roi Albert II dispose pour 2013 s'élève à 11,5 millions d'euros, soit une progression de 2,5% quand la Commission européenne table sur inflation de 1,8% pour l'année à venir, qui devrait d'ailleurs voir la dette belge devrait dépasser le niveau de son PIB. Il est à noter que le roi emploie les deux tiers du montant de la liste civile pour ses activités et les frais divers de la couronne, le reste étant réparti entre les membres de la famille royale, dont les actifs seront, eux, bien gelés.
L'information, déjà indigeste en soi, est encore moins bien passée du fait du discours de Noël et du Nouvel An polémique que le souverain a prononcé, s'ingérant dans la vie politique. Disponible en page d'accueil du site de la monarchie belge, l'allocution a notamment fait réagir en raison du parallèle tiré par le roi Albert entre la crise actuelle et celle des années 1930, et sa dénonciation des "discours populistes", visant, de l'avis de nombreux commentateurs, le parti séparatiste N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie, alliance néo-flamande) mené par Bart De Wever, auteur d'une percée fulgurante aux dernières élections communales (38% des suffrages). L'an dernier, le souverain avait, en gelant le montant de la liste civile, offert une réponse consensuelle aux attaques du N-VA. Cette fois, ce n'a pas été le cas.