Dans ses meilleurs moments, Hollywood utilise son pouvoir et son rayonnement pour détourner les caméras de son nombril et scruter l'ailleurs. Contre toute attente, Angelina Jolie, star et compagne de Brad Pitt, est le dernier exemple de ce rare phénomène observable dans le cinéma américain.
Alors que My Week With Marilyn, Hugo Cabret et The Artist rouvrent les archives du cinéma hollywoodien, l'actrice passe derrière la caméra avec Au pays du sang et du miel, une histoire d'amour sur fond de guerre en Bosnie-Herzégovine, tournée sur place en serbo-croate et sans aucun acteur connu. Car le nom d'Angelina Jolie est bien la seule fioriture marketing de ce film qui aurait difficilement pu exister sans l'aura de la comédienne.
Catapultée bombe bankable depuis Lara Croft : Tomb Raider (2001) et ses cachets de 20 millions de dollars, Angelina Jolie est devenue le symbole du cinéma hollywoodien, à cheval entre le divertissement pop-corn et la cérémonie des Oscars. Pourtant, l'actrice et réalisatrice est la première à s'en étonner : "Mais ce n'est pas ainsi que, moi, je me vois. Et puis la célébrité, c'est tellement fugace... (...) Qui sait combien de temps ça va encore durer si je continue à faire ce genre de film !"
Dans les pages de Ciné Télé Obs comme ailleurs, Angelina Jolie est d'une sincérité fascinante vu son statut de reine : "[Sur le tournage d'Au pays du sang et du miel] il y a eu des moments un peu surréalistes où, oui, je me sentais toute petite au milieu de ces gaillards d'1,95 mètre... La plupart des hommes avaient physiquement combattu au cours de cette guerre. (...) Vanessa Glodjo, l'actrice qui joue la soeur de l'héroïne, a traversé Sniper Alley [une avenue de Sarajevo, cible principale des snipers pendant le siège] tous les jours pendant trois ans pour se rendre à ses cours de comédie. Voilà le genre d'acteurs à qui j'avais à faire. Eux et moi, on ne joue pas dans la même catégorie."
Angelina Jolie en a surpris quelques-uns avec ses intentions filmiques et, malgré sa réputation, elle a dû batailler pour tourner le film en serbo-croate sans tête d'affiche connue. "Brad [Pitt] a été d'un grand soutien", confie-t-elle une nouvelle fois alors qu'elle est interrogée sur la nature inhabituelle de son film. "Avec Au pays du sang et du miel, on ne s'attend évidemment pas à braquer la banque. On l'a projeté à quelques personnes choisies au hasard à Los Angeles, et on leur a demandé combien d'entre elles allaient 'googliser' la Bosnie en rentrant à la maison : la moitié a levé la main. Je me suis alors dit que j'avais fait mon boulot de réalisatrice. Susciter le dialogue, voilà l'objectif."
Après son ovation à Sarajevo lors de la présentation du film, l'actrice oscarisée est arrivée à Paris dans la soirée du 15 février pour une nouvelle étape de sa tournée promotionnelle. De passage ce soir sur le plateau du Grand Journal (diffusion en deuxième partie), Angelina Jolie présentera Au pays du sang et du miel aux côtés de Bernard-Henri Lévy, qu'elle avait rencontré à l'occasion du tournage d'Un coeur invaincu (2007) et qui s'est dit "bouleversé" par ce film "incroyable".
Alors que son projet avec Luc Besson semble retardé, Angelina Jolie retournera dans les studios hollywoodiens pour Maleficient, un film Disney.
Retrouvez l'interview d'Angelina Jolie dans Ciné Télé Obs, 18 février 2012.