L'histoire hollywoodienne est remplie de stars déchues et autres carrières détruites, mais rares sont celles qui se dévoilent en temps réel.
Séparés par quelques semaines, les blockbusters John Carter et Battleship sont menés par Taylor Kitsch, l'une des révélations de la série Friday Night Lights. Directement passé à la case superproduction, cet acteur de 30 ans semble voué à marquer l'année - reste à savoir dans quel sens.
Mars, la malédiction
Il y a quelques semaines, le microcosme hollywoodien était secoué par un communiqué de Disney. Sonné par les premiers résultats de John Carter au box-office et poussé par la presse, le studio annonçait que l'échec du film leur coûterait environ 200 millions de dollars. Un désastre qui achevait le parcours chaotique d'un blockbuster bancal, adapté d'un classique de science-fiction et maltraité par une campagne marketing maladroite. En première ligne avec le réalisateur Andrew Stanton, le méconnu Taylor Kitsch était désigné comme l'un des coupables de cet échec, qui complète la liste des flops martiens après Mission to Mars (2000) de Brian de Palma et Planète rouge (2000) avec Val Kilmer.
À peine sorti de la promotion de John Carter, l'acteur retrouvait Rihanna, Alexander Skarsgard, Brooklyn Decker et le réalisateur Peter Berg pour lancer celle de Battleship. Comme l'épopée martienne, le film met en scène un soldat instable qui révèle son caractère héroïque lors d'un conflit avec des aliens belliqueux. L'océan et les navires métalliques remplacent le désert extraterrestre et les vaisseaux de verre, mais le spectateur est la même victime du pop-corn, avide de scènes spectaculaires où sont glissés quelques pistes psychologiques.
Science et fiction
En plus de Taylor Kitsch, John Carter et Battleship partagent le même budget conséquent, estimé entre 200 et 250 millions de dollars - sans compter le marketing. Une somme rarement investie par les studios, qui ne cessent de retarder ou annuler les superproductions pour économiser quelques dizaines de millions.
Pourtant, Universal semble avoir pris moins de risques que Disney. Vendu avec l'étiquette Transformers depuis des mois, Battleship puise dans le cinéma de Michael Bay la féraille des robots, l'adrénaline des courses contre la montre et la masse de spectateurs. L'histoire d'amour et le conflit du héros ne sont que de simples instruments au service d'un grand huit tonitruant, mené tambour battant. En outre, la présence de la chanteuse Rihanna attire beaucoup d'attention.
Mais la simplicité de Battleship est aussi sa force. Réglé comme un métronome, le scénario ne laisse rien au hasard et ménage le spectateur, au contraire de John Carter. Trop vaste et mal rythmée, l'épopée martienne est un film-somme colossal, articulé autour de deux planètes et deux époques. Et l'étrange bestiaire de Mars - amusant ou ridicule, au choix - semble bien plus compliqué à vendre qu'une armée de robots destructeurs.
À quarante-huit heures de la sortie mondiale de Battleship, le destin de Taylor Kitsch continue de s'écrire au rythme du box-office. Et si le blockbuster maritime semble promis à un meilleur avenir dans les salles obscures que John Carter, celui qui était décrit comme le nouveau Bruce Willis par Peter Berg va devoir continuer à faire ses preuves. Prochaine étape : Savages, le polar nerveux d'Oliver Stone avec Blake Lively.
Geoffrey Crété