"J'ai décidé de me venger, moi et mon sexe. (...) J'ai compris que mon arme serait l'écriture." Brigitte Fontaine fait l'objet d'un très beau portrait dans Télérama, en kiosques ce 9 juillet 2019, à l'occasion de sa participation au documentaire Haut les filles ! de François Armanet sur les artistes féminines dans le rock. L'ancienne complice de Jacques Higelin, dont elle refuse de parler tant la douleur de sa disparition est encore vive, apparaît dans le film aux côtés de Charlotte Gainsbourg, Françoise Hardy ou Elli Medeiros qui fut, comme Brigitte Fontaine, une icône punk.
Une grande partie de ce portrait de Brigitte Fontaine est consacrée à sa rébellion justement. Elle raconte avoir depuis toujours voulu défendre la cause des femmes et que "les horreurs vécues" n'ont fait que renforcer cette urgence. Elle raconte les avortements clandestins et les violences sexuelles dont elle a été victime : "À Paris, où je suis venue après le bac pour faire du théâtre, je suis tombée enceinte plusieurs fois. J'ai subi des avortements dans des conditions si lamentables que j'ai failli mourir de septicémie. Pour le dernier, le travail était impeccable... Mais le médecin m'a violée. Atroce. Pendant au moins deux mois, j'en ai perdu le sommeil. Dès que je m'endormais, une décharge électrique me traversait le corps et me réveillait. L'avortement avait été illégal, je ne pouvais pas porter plainte."
En 1971, elle signe évidemment le Manifeste des 343 pour le droit à l'avortement. Rédigé par Simone de Beauvoir, ce texte est signé par 343 femmes qui disaient haut et fort "je me suis fait avorter" et s'exposaient ainsi à des poursuites. Brigitte Fontaine y apparaît au côté des actrices Stéphane Audran, Jeanne Moreau, Catherine Deneuve et Françoise Fabian, mais aussi de très nombreuses artistes, comme Agnès Varda, et intellectuelles, comme la lesbienne radicale Monique Wittig. Ce n'est que le 17 janvier 1975 que l'IVG est légalisée en France avec la loi Veil.
Télérama nous explique que Brigitte Fontaine a ça de moderne que depuis ses débuts, bien avant l'air #MeToo, nombre de ses textes sont des appels à la révolte contre la société patriarcale. À tout juste 80 ans, l'artiste n'a rien perdu de cette colère et de sa parole révolutionnaire qu'elle décrit, avec beaucoup de poésie, comme "bouleversante" : "Dans les deux sens du mot. Qui chahute l'ordre établi et suscite en même temps une émotion."
Télérama, en kiosques le 9 juillet 2019.