A 65 ans, on peut encore vivre de grandes premières : et c'est sans la moindre marque d'intimidation que Camilla Parker Bowles, d'une élégance digne d'une reine et d'une assurance tout simplement remarquable, a fait honneur à sa première participation à l'ouverture rituelle et magistrale du Parlement par la reine Elizabeth II, mercredi 8 mai 2013 au palais de Westminster.
Au côté du prince Charles, convié pour la première fois en 17 ans à seconder sa mère lors de ce rendez-vous hérité du XVIe siècle et émaillé par le traditionnel discours dans lequel la monarque établit les grandes lignes de la politique menée pour l'année à venir (en l'occurrence, 20 projets de loi ont été évoqués), la duchesse de Cornouailles, d'une allure saisissante dans une robe de soie et dentelle champagne de son styliste favori Bruce Oldfield (également un chouchou de la souveraine) et coiffée du diadème Boucheron ayant appartenu à la reine mère (il lui avait été légué en 1942 par Mme Greville), prêté par l'actuelle souveraine, n'a pas manqué ses débuts dans les ors du Parlement et les fastes de ce cérémoniel immuable, huit ans après être devenue la femme du prochain roi d'Angleterre.
Et si le prince de Galles se devait d'être à la hauteur de son statut d'héritier du trône, lors de cette contribution exceptionnelle que la plupart des observateurs ont, malgré les dénégations de Clarence House, interprétée comme une amorce de transition au sommet de la monarchie (il représentera d'ailleurs la monarque lors du prochain sommet du Commonwealth, en novembre au Sri Lanka, qu'elle n'avait encore jamais manqué en 40 ans), Camilla a parfaitement su transcender son statut de reine en puissance, que personne n'aurait eu l'idée de lui dénier en l'observant à Westminster. Les temps changent...
Jadis honnie malgré elle en raison des malheurs de la bien-aimée Lady Di, Camilla Parker Bowles a progressivement gagné l'estime et l'affection de ses compatriotes, à force d'un comportement irréprochable de mesure, de disponibilité et de zèle discret au service de la couronne d'Angleterre. S'il se trouve encore bien des Britanniques pour continuer à la voir comme une briseuse de ménage et lui refuser le droit de devenir reine, de même qu'il s'en trouve (beaucoup) pour préférer que le prince William grille la politesse à son père sur le trône, son abnégation, mais aussi sa superbe et incontestable complicité avec le prince Charles ont fait évoluer les mentalités. Et, les chocs successifs provoqués dans l'opinion par le divorce (1996) puis la mort (1997) de la princesse Diana s'estompant, le grand amour du prince Charles a pu prendre sa place dans le coeur des Britanniques, mais aussi auprès de la reine Elizabeth II, dont elle est aujourd'hui une servitrice dévouée (son engagement tout au long de l'année du jubilé de diamant, en 2012, en témoigne) et particulièrement appréciée. Adoubée, au sens figuré comme au propre, par la souveraine, qui lui remettait en avril 2012 les insignes de Dame grand-croix dans l'Ordre royal de Victoria pour le jour même de son 7e anniversaire de mariage avec le prince Charles, celle que ses compatriotes ne désignaient à une époque que comme "l'autre femme" vient de franchir un nouveau palier. Onze ans après son entrée officielle dans la famille royale, en 2002, lorsque la reine Elizabeth II l'avait conviée - sans tenir compte de la désapprobation d'une partie de l'opinion - dans la loge royale à Buckingham pour le concert du jubilé d'or de ses 50 ans de règne.
Personne de confiance de la reine, possible future reine, et guide bienveillant pour celle à venir après elle - Kate Middleton, belle-fille avec qui elle s'entend à merveille -, la duchesse Camilla est depuis longtemps passée d'ombre à lumière. Mais sa première apparition à l'inauguration du Parlement formalise un peu plus le rôle qu'elle devra assurément jouer dans la passation de témoin qui aura lieu par le biais du prince Charles entre la reine Elizabeth II et le prince William.
G.J.